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Il y a 20 ans l'ICGN était créé, que de progrès !

En cette période d'incertitude, il est utile de revenir sur le passé pour comprendre le présent et anticiper l’avenir. En effet le "retour de l'histoire" et la force de la logique historique sont des facteurs qui façonnent l'existence des peuples et déterminent la durée de vie des nations comme celle des empires. En 2015, nous sommes à un tournant décisif dans la mutation des États et des entreprises.


Il y a 20 ans l'ICGN était créé, que de progrès !
La courbe de vie des États et des empires économiques-financiers sera fortement influencée par le retour à un monde multipolaire d'une manière pacifique ou bien guerrière. La IIIème guerre mondiale par procuration ou par confrontation directe est en cours, sinon très probable à court terme.

Par contre, la globalisation des entreprises progresse et même s'accélère. Pour une entreprise cette opération de globalisation nécessite au préalable l'adoption de nouveaux comportements, de nouvelles règles de conduite, une nouvelle organisation, qui sont prescrits par les principes de gouvernement d'entreprise, d'éthique et de responsabilité sociale de l'entreprise. Ces principes sont enrichis en permanence par les travaux des équipes d'experts des investisseurs institutionnels regroupés dans l’International Corporate Governance Network (ICGN,) réseau représentant 26 000 G$ d'actifs sous gestion. Actuellement ces investisseurs institutionnels sont devenus les actionnaires de référence des sociétés cotées du monde entier. Leur influence est incontournable, parce que leur périmètre est mondial et qu'ils accompagnent le développement global des entreprises dans lesquelles ils ont investi avec un horizon de long terme (LT). Les entreprises et les investisseurs sont liés par le même horizon global et de LT. Les régulateurs des marchés et les superviseurs des institutions financières ne font que traduire cet état de fait, car ils sont aussi des
parties prenantes de l'entreprise.

Depuis la création il y a 20 ans de l'ICGN, auquel cette lettre 42 est en partie consacrée, que de progrès !

Nous nous souvenons très bien des déclarations de notre ami Bill Crist, président de Calpers (140G$ à l'époque ), qui, au début des années 80, recommandait aux entreprises d'améliorer leur rentabilité (un retour pour l'actionnaire de 8%), la création dans les Conseils d'administration (CA) ou de surveillance (CS) de 2 ou 3 comités spécialisés pour mieux préparer les décisions du CA/CS composés de "quelques" administrateurs indépendants . La presse et les analystes financiers, soutenus par les entreprises et les organisations patronales ont crié à "la dictature des fonds de pension", ces "Veuves Écossaises assoiffées de sang". Histoire vraie !

Les premiers corporate governance guidelines de TIAA-CREF, de CALPERS, les codes Cadbury, Hampel, Myners, les codes Vienot 1 et 2 étaient proposés aux entreprises sous formes de recommandations et non pas d'obligations. Mais le dialogue était inexistant. Les AG des grands groupes français étaient du spectacle "bon enfant", des " faire valoir " des dirigeants issus des ministères et solidaires pour ne pas changer l'ordre établi sous la tutelle de l'État actionnaire et de la golden share. En Amérique du Nord, au Royaume Uni et dans la plupart des pays Européens, les CA/CS étaient composés d’executives directors ; il n'y avait pas de comités spécialisés, la fixation des rémunérations des dirigeant se faisait "entre amis", le choix des administrateurs s'effectuait par cooptation de personnalités issues de la Haute Administration (en France le Corps des Mines, l'Inspection des Finances ou l'ENA). Il était difficile pour un actionnaire étranger d'exercer ses droits de vote, de poser une question écrite ou orale, encore plus difficile de déposer un projet de résolution. Découragés par tant d'obstacles, les fonds de pension et les autres investisseurs étrangers "votaient avec leurs pieds". Après dix ans, les premiers résultats portaient leurs fruits : l'OCDE et la Banque Mondiale validaient ces principes de gouvernement d'entreprise et en recommandaient fortement la mise en oeuvre. Les CA/CS se dotaient de comités spécialisés (d'audit, des rémunérations et des nominations). Les investisseurs institutionnels exerçaient de plus en plus leurs droits de vote. Après la crise financière issue de la titrisation des crédits immobiliers américains et européens insolvables via les CDO, après quelques faillites retentissantes (ENRON, Parmalate, AIG, Lehman Brothers, WaMu, Northern Rock, Dexia, Fortis notamment), les actionnaires ont décidé de passer à l'action, d'exercer tous leurs droits, suivis des parties prenantes conscientes de la nécessité d'adopter une attitude pro active. Depuis 5 ans, un dialogue de plus en plus étroit s'est établi entre les émetteurs et les investisseurs, au-delà des traditionnels road show, pour mesurer les effets de la RSE et les orientations de l'ISR, les pratiques ESG, afin de fidéliser l'actionnariat de référence et de restaurer la confiance. Aujourd'hui, 20 ans après, le poids des membres de l'ICGN s'est accru ; ces investisseurs institutionnels, les fonds souverains comme Norges Bank IM, QIA, ADIA, CIC, les Mutual Funds comme BlackRock, Fidelity, dont les actifs sous gestion se mesurent en trillions de $, deviennent des actionnaires prépondérants de toutes les sociétés cotées. Les "batailles" actuelles portent sur l'application des principes "one share one vote", "say on pay", "comply or explain", transparency, independent director, diversity, "long term social responsible investment", climate change, "SOX and internal control report", risk management ... notamment.

Les investisseurs institutionnels ont réalisé qu'ils avaient un devoir de vigilance vis-à-vis des épargnants, des retraités et des assurés qui leur ont confié leurs économies. Pour s'y conformer et exercer efficacement leur contrôle permanent de l'activité des entreprises dans lesquelles ils ont investi, les investisseurs institutionnels ont constitué des équipes dédiées. Ces équipes surveillent en permanence la mise en oeuvre par les émetteurs de la gouvernance, de la RSE, des principes éthiques, de la prévention des risques et des conflits d'intérêts. Les investisseurs et les gestionnaires d'actifs sont obligés à leur tour de rendre compte à leurs dépositaires de l'usage des fonds et des droits qui leur ont été confiés. S'ils détectent chez un émetteur une opération frauduleuse, un abus de bien social, une grave faute de gestion de la part d'un dirigeant ou mandataire social, ils exercent leur devoir d'alerte, le whistleblowing, à l'égard de la communauté des actionnaires.

Le dialogue entre émetteurs et investisseurs est devenu régulier et constructif ; les AG ont retrouvé leur légitimité et leur souveraineté ; la démocratie actionnariale a progressé et la confiance semble restaurée.

Téléchargez ci-dessous la lettre n° 42
lettre_42.pdf lettre_42.pdf  (713.52 Ko)

Jean-Aymon MASSIE
Président de l'AFGE
Association Française de Gouvernement d'Entreprise
8 rue Henri Regnault - La Défense 6
92400 COURBEVOIE
www.afge-asso.org

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Mercredi 30 Septembre 2015




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