Le rendement des obligations d’Etat américaines à 10 ans a récemment atteint son plus haut niveau depuis 2014. Quant au rendement à 2 ans, il évolue à un pic inédit depuis 2008 (graphique 1). Les investisseurs se demandent aujourd’hui si ces mouvements marquent la fin d’une décennie de rallye haussier sur les marchés obligataires, voire même un total effondrement de ces marchés.
Le prix des bons du Trésor américain – « la mère de tous les actifs » – est souvent considéré comme une référence du système financier mondial, car il apporte des indications précieuses sur les conditions de marché et l’économie. Une inversion du cycle baissier des taux d’intérêt, ancré depuis plusieurs décennies, signifierait un changement de régime pour les marchés et l’économie. Or, une forme d’addiction à la baisse continue des taux d’intérêt s’est forgée ces dernières années chez bon nombre d’investisseurs.
La volatilité des obligations pourrait repartir à la hausse, cependant nous ne pensons pas que l’évolution récente du marché marque un renversement majeur de la tendance.
Les répercussions des « Trumponomics », ainsi que le creux de l’inflation à court terme, pourraient entraîner une révision à la hausse des objectifs de la Fed sur les taux core dans les prochains mois, en particulier sur la partie courte de la courbe des taux. Cependant, à moyen terme, l’environnement de taux bas n’est pas encore menacé.
Finalement, et dans une certaine mesure, nous nous attendons à une autocorrection de la hausse des rendements, compte tenu des effets bénéfiques des réductions d’impôts aux Etats-Unis, de l’effet de levier qui reste élevé dans la plupart des régions, des tendances démographiques et de l’absence de signes de pression inflationniste des salaires.
Que nous enseigne l’évolution des rendements des bons du Trésor américains ?
1.Les « Trumponomics » sont un facteur clé : l’évolution des rendements des bons du Trésor américain s’est révélée très corrélée à l’agenda politique, assez mouvant, du Président Donald Trump (voir le graphique 2). En d’autres termes, les réductions d'impôts ont été un facteur clé de la hausse des rendements. Cela s'explique en partie par le fait que le marché est convaincu de l’accélération de la croissance à court terme. Il est aussi convaincu que la Fed est davantage disposée à augmenter ses taux directeurs, dans le sillage de ces réductions d'impôts. De plus, le déficit américain sera plus élevé en raison des coupes fiscales, ce qui augmentera l'émission d'obligations d'État.
2.Tous les regards sont portés sur l’inflation : l’inflation aux Etats-Unis semble avoir atteint son point le plus bas, du fait notamment d’une réaction décalée dans le temps face à l'amélioration de la croissance au cours des derniers trimestres (voir graphique 3). La hausse récente des prix du pétrole – bien que partiellement (quelque peu) corrélée avec ce qui précède – a très probablement déclenché des mouvements vendeurs sur les obligations.
3.A cela, vient s’ajouter la politique de la Fed, favorable à un resserrement monétaire inéluctable, qui alimente ces derniers temps la hausse des rendements obligataires. Et pour renforcer cette tendance, la Banque du Japon a réduit ses achats d’obligations, alors que dans un avenir plus ou moins proche la Banque centrale européenne envisage, elle aussi, de mettre en place un resserrement de sa politique monétaire.
La fin du rallye obligataire ?
Ces conditions ont incité les opérateurs de marché à renforcer leurs positions baissières sur les obligations souveraines. Les facteurs mentionnés ci-dessus peuvent soutenir la hausse des taux d’intérêt à court terme (voir graphique 2).
En revanche, à moyen terme, nous ne voyons pas de changement de régime et l’environnement de lowflation devrait se maintenir. Nous voyons donc des limites à la hausse des taux d’intérêt.
Une hausse structurelle de l’inflation (par opposition à l’amélioration cyclique indiquée sur le graphique 3) nécessite une hausse des salaires. Or, en dépit d’un chômage très faible ces dernières années outre-Atlantique (au plus bas depuis l’éclatement de la bulle Internet), aucune inflation salariale significative n’est observée (voir graphique 4).
Actuellement, la génération des baby-boomers, qui représente une grande partie du marché du travail américain, freine la hausse des salaires : ils ont globalement des salaires élevés, mais relativement constants. Lorsque ces travailleurs prendront leur retraite, l’inflation salariale devrait repartir, les générations suivantes devant profiter d’une accentuation de la courbe salariale. A l’horizon des 6 à 12 prochains mois, il ne devrait donc pas y avoir d’effet salarial sur l’inflation et les taux d’intérêts.
Au sein du marché obligataire, la légère hausse de l’inflation apparait plus cyclique que structurelle étant donné que les anticipations d’inflation à long terme n’ont pas vraiment changé par rapport aux prévisions à court terme. Cela signifie que l’augmentation des rendements nominaux entraine une hausse des rendements réels (voir graphique 5), venant impacter négativement la croissance réelle. Toutefois, cette hausse des rendements réels grèverait la croissance réelle de l’économie pouvant entrainer un retour en grâce des obligations auprès des investisseurs, au détriment des actifs risqués comme les actions.
En résumé, nous ne croyons pas à « la fin » des obligations d’Etat en tant que classe d’actifs. Notre scénario est celui d’une correction temporaire, mais sans renversement du cycle d’appréciation pluriannuel que nous connaissons (voir graphique 6).
L’impact sur les actions : un exercice d’équilibre
Quelles sont les répercussions générales sur l’allocation d’actifs ? Il va sans dire que si les rendements obligataires se maintiennent autour des niveaux actuels, les investisseurs en actions peuvent continuer à se tourner vers les classes d’actifs dites risquées. Cependant, la corrélation négative historique entre le prix des obligations et leurs rendements pourrait rapidement devenir plus marquée, avec une hausse des rendements réels qui freinerait l’appétit pour le risque (voir graphique 7). En d’autres termes, une nouvelle hausse des taux obligataires risquerait d’interrompre la progression des actions.
Une hausse des rendements conjuguée à une croissance plus forte devrait aller de pair avec une hausse des actions. Toutefois, si les taux obligataires surpassaient significativement les taux de croissance, par exemple en cas de hausse marquée de l’inflation, il serait alors nécessaire de faire preuve de prudence sur les marchés actions. Dans ce cas de figure, la hausse des rendements obligataires deviendrait rapidement problématique pour les actifs risqués. Actuellement, nous observons une hausse des taux obligataires, mais aussi des révisions à la hausse des estimations de croissance, ce qui rend les investisseurs en actions plutôt confiants. Tant que les indicateurs de croissance soutiennent l’optimisme économique, il est peu probable que les actions soient impactées.
A propos de Nordea Asset Management
Nordea Asset Management gérant 222 milliards d’euros*, fait partie du groupe Nordea, le plus grand groupe financier d’Europe du Nord, avec 330 milliards d’euros d’actifs sous gestion*.
Nordea Asset Management offre une large gamme de solutions d’investissement à la fois pour les investisseurs européens et d’autres continents. Nous collaborons avec de nombreux clients et plateformes, des banques, des gestionnaires de portefeuille, des conseillers patrimoniaux indépendants et des sociétés d’assurance.
Nordea Asset Management est présent à Cologne, Copenhague, Francfort, Helsinki, Londres, Luxembourg, Madrid, Milan, New-York, Oslo, Paris, Sao-Paulo, Singapour, Stockholm, Vienne, Genève et Zurich. Cette présence locale marque la volonté de Nordea d’être toujours accessible pour ses clients et de leur offrir les meilleurs services.
Le succès de Nordea repose sur une approche multi-boutique combinant l’expertise de nos équipes de gestion internes et des compétences exclusives de gérants externes avec pour objectif de générer de l’alpha durablement pour le bénéfice de nos clients. Nos solutions d’investissement couvrent toutes les classes d’actifs, de la gestion obligataire aux actions en passant par des solutions diversifiées, investissant dans de nombreux marchés comme l’Europe, les Etats-Unis, les marchés émergents voire le monde entier.
*Source: Nordea Investment Funds, S.A., 31.12.2017
Le prix des bons du Trésor américain – « la mère de tous les actifs » – est souvent considéré comme une référence du système financier mondial, car il apporte des indications précieuses sur les conditions de marché et l’économie. Une inversion du cycle baissier des taux d’intérêt, ancré depuis plusieurs décennies, signifierait un changement de régime pour les marchés et l’économie. Or, une forme d’addiction à la baisse continue des taux d’intérêt s’est forgée ces dernières années chez bon nombre d’investisseurs.
La volatilité des obligations pourrait repartir à la hausse, cependant nous ne pensons pas que l’évolution récente du marché marque un renversement majeur de la tendance.
Les répercussions des « Trumponomics », ainsi que le creux de l’inflation à court terme, pourraient entraîner une révision à la hausse des objectifs de la Fed sur les taux core dans les prochains mois, en particulier sur la partie courte de la courbe des taux. Cependant, à moyen terme, l’environnement de taux bas n’est pas encore menacé.
Finalement, et dans une certaine mesure, nous nous attendons à une autocorrection de la hausse des rendements, compte tenu des effets bénéfiques des réductions d’impôts aux Etats-Unis, de l’effet de levier qui reste élevé dans la plupart des régions, des tendances démographiques et de l’absence de signes de pression inflationniste des salaires.
Que nous enseigne l’évolution des rendements des bons du Trésor américains ?
1.Les « Trumponomics » sont un facteur clé : l’évolution des rendements des bons du Trésor américain s’est révélée très corrélée à l’agenda politique, assez mouvant, du Président Donald Trump (voir le graphique 2). En d’autres termes, les réductions d'impôts ont été un facteur clé de la hausse des rendements. Cela s'explique en partie par le fait que le marché est convaincu de l’accélération de la croissance à court terme. Il est aussi convaincu que la Fed est davantage disposée à augmenter ses taux directeurs, dans le sillage de ces réductions d'impôts. De plus, le déficit américain sera plus élevé en raison des coupes fiscales, ce qui augmentera l'émission d'obligations d'État.
2.Tous les regards sont portés sur l’inflation : l’inflation aux Etats-Unis semble avoir atteint son point le plus bas, du fait notamment d’une réaction décalée dans le temps face à l'amélioration de la croissance au cours des derniers trimestres (voir graphique 3). La hausse récente des prix du pétrole – bien que partiellement (quelque peu) corrélée avec ce qui précède – a très probablement déclenché des mouvements vendeurs sur les obligations.
3.A cela, vient s’ajouter la politique de la Fed, favorable à un resserrement monétaire inéluctable, qui alimente ces derniers temps la hausse des rendements obligataires. Et pour renforcer cette tendance, la Banque du Japon a réduit ses achats d’obligations, alors que dans un avenir plus ou moins proche la Banque centrale européenne envisage, elle aussi, de mettre en place un resserrement de sa politique monétaire.
La fin du rallye obligataire ?
Ces conditions ont incité les opérateurs de marché à renforcer leurs positions baissières sur les obligations souveraines. Les facteurs mentionnés ci-dessus peuvent soutenir la hausse des taux d’intérêt à court terme (voir graphique 2).
En revanche, à moyen terme, nous ne voyons pas de changement de régime et l’environnement de lowflation devrait se maintenir. Nous voyons donc des limites à la hausse des taux d’intérêt.
Une hausse structurelle de l’inflation (par opposition à l’amélioration cyclique indiquée sur le graphique 3) nécessite une hausse des salaires. Or, en dépit d’un chômage très faible ces dernières années outre-Atlantique (au plus bas depuis l’éclatement de la bulle Internet), aucune inflation salariale significative n’est observée (voir graphique 4).
Actuellement, la génération des baby-boomers, qui représente une grande partie du marché du travail américain, freine la hausse des salaires : ils ont globalement des salaires élevés, mais relativement constants. Lorsque ces travailleurs prendront leur retraite, l’inflation salariale devrait repartir, les générations suivantes devant profiter d’une accentuation de la courbe salariale. A l’horizon des 6 à 12 prochains mois, il ne devrait donc pas y avoir d’effet salarial sur l’inflation et les taux d’intérêts.
Au sein du marché obligataire, la légère hausse de l’inflation apparait plus cyclique que structurelle étant donné que les anticipations d’inflation à long terme n’ont pas vraiment changé par rapport aux prévisions à court terme. Cela signifie que l’augmentation des rendements nominaux entraine une hausse des rendements réels (voir graphique 5), venant impacter négativement la croissance réelle. Toutefois, cette hausse des rendements réels grèverait la croissance réelle de l’économie pouvant entrainer un retour en grâce des obligations auprès des investisseurs, au détriment des actifs risqués comme les actions.
En résumé, nous ne croyons pas à « la fin » des obligations d’Etat en tant que classe d’actifs. Notre scénario est celui d’une correction temporaire, mais sans renversement du cycle d’appréciation pluriannuel que nous connaissons (voir graphique 6).
L’impact sur les actions : un exercice d’équilibre
Quelles sont les répercussions générales sur l’allocation d’actifs ? Il va sans dire que si les rendements obligataires se maintiennent autour des niveaux actuels, les investisseurs en actions peuvent continuer à se tourner vers les classes d’actifs dites risquées. Cependant, la corrélation négative historique entre le prix des obligations et leurs rendements pourrait rapidement devenir plus marquée, avec une hausse des rendements réels qui freinerait l’appétit pour le risque (voir graphique 7). En d’autres termes, une nouvelle hausse des taux obligataires risquerait d’interrompre la progression des actions.
Une hausse des rendements conjuguée à une croissance plus forte devrait aller de pair avec une hausse des actions. Toutefois, si les taux obligataires surpassaient significativement les taux de croissance, par exemple en cas de hausse marquée de l’inflation, il serait alors nécessaire de faire preuve de prudence sur les marchés actions. Dans ce cas de figure, la hausse des rendements obligataires deviendrait rapidement problématique pour les actifs risqués. Actuellement, nous observons une hausse des taux obligataires, mais aussi des révisions à la hausse des estimations de croissance, ce qui rend les investisseurs en actions plutôt confiants. Tant que les indicateurs de croissance soutiennent l’optimisme économique, il est peu probable que les actions soient impactées.
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