Marc Touati
Evidemment, nous aimerions tous annoncer le retour de la croissance forte dans l'Hexagone. Pourtant, soyons réalistes : il n'en est rien. Et ce, notamment parce que l'économie française reste fragilisées par cinq handicaps : un matraquage fiscal insupportable, une crise de la dette qui est loin d'être terminée non seulement en France mais dans la grand majorité des pays européens, des taux d'intérêt qui remontent et vont encore augmenter dans les prochains mois, un euro trop fort, et, pour couronner le tout, un manque de confiance durable.
Revenons sur cette liste des freins à la croissance qui n'est malheureusement pas exhaustive.
1. Le matraquage fiscal est devenu confiscatoire. Avec un taux de prélèvements obligatoires de plus de 46 % du PIB, la France a conforté son titre de champion du monde de la fiscalité. Le gouvernement lui-même commence à admettre l'idée d'un ras-le-bol fiscal. Pourtant, il continue d'augmenter la pression fiscale. A croire qu'il souffre d'une véritable crise de schizophrénie. Et c'est bien là que le bât blesse. Car, à force de ponctionner les entreprises et les ménages, tout en augmentant les dépenses publiques de fonctionnement, le gouvernement est en train de casser la corde qui permettait aux entreprises de continuer à investir et à embaucher malgré une pression fiscale et réglementaire prohibitive.
2. La crise de la dette publique est toujours bien présente. Et pour cause : depuis désormais six ans, la croissance française est insuffisante ne serait-ce que pour rembourser les intérêts de la dette publique. Ainsi, simplement pour payer ces derniers, l'Etat doit encore augmenter sa dette déjà pléthorique. C'est ce que l'on appelle la « bulle de la dette » qui traduit le fait que cette dernière s'autoalimente. A ce rythme, la dette publique atteindra 100 % du PIB courant 2014, suscitant une augmentation des taux d'intérêt des obligations d'Etat.
3. Il s'agit là du troisième frein à la croissance. Après avoir atteint des planchers historiques, permettant de limiter le déficit public, les taux d'intérêt des obligations d'Etat ont déjà repris le chemin de la hausse depuis le printemps dernier. A quasiment 2,5 % aujourd'hui, ils devraient même se rapprocher des 3 % d'ici novembre, lorsque le gouvernement devra reconnaître que le déficit public sera supérieur aux 4,1 % du PIB en 2013 et toujours proche des 4 % en 2014. En plus d'augmenter le coût de la dette publique, cette augmentation des taux d'intérêt cassera l'investissement, l'emploi et la consommation.
4. A plus de 1,35 dollar pour un euro, la devise européenne reste beaucoup trop forte. Le niveau d'équilibre de l'euro/dollar (en fonction des fondamentaux économiques) est de 1,15 dollar pour l'ensemble de l'UEM. Pis, il est de 1,05 pour la France. Il faut donc être réaliste : tant que l'euro ne passera pas sous les 1,20 dollar, la croissance ne pourra redémarrer significativement et durablement.
5. Dans le contexte global d'une croissance faible engendrée par ces quatre handicaps, la confiance des entreprises et des ménages va rester faible. Certes, les indicateurs INSEE du moral des industriels et des particuliers se sont légèrement redressés ces derniers mois. Ils restent cependant toujours inférieurs à leur moyenne de longue période et montrent que les acteurs économiques français restent particulièrement inquiets, en particulier sur le front de la fiscalité et du chômage.
Pour conclure, n'en déplaise au gouvernement, mais surtout à l'ensemble des Français, l'atonie économique hexagonale n'est pas terminée. En fait, l'économie nationale s'est engluée dans un cercle vicieux dramatique : désinvestissement-chômage-baisse de la consommation-croissance molle…
Bien pire, l'augmentation de la pression fiscale et le maintien d'un euro trop fort vont alourdir la facture, ou plutôt la « fracture ». Et ce ne sont évidemment pas les artifices tels que les emplois d'avenir ou le CICE qui vont inverser significativement la tendance. Au total, la croissance pourra se stabiliser entre 0 et 1 % au moins jusqu'à la fin 2014, ce qui est très loin d'une vraie reprise qui ne commencerait vraiment qu'à partir d'une progression annuelle du PIB de 2 %.
Le vrai problème est qu'avec une croissance structurelle (c'est-à-dire celle obtenue lors d'un fonctionnement normal de l'économie) de seulement 0,8 %, l'atteinte de la barre des 2 % est devenue inenvisageable. Du moins tant que la France refusera d'engager de véritables réformes structurelles, telles que la baisse de la pression fiscale pour tous (entreprises et ménages), la réduction des dépenses publiques vers un niveau plus efficace de 50 % du PIB (contre 57,1 % actuellement), sans oublier la diminution du coût du travail et des rigidités réglementaires en tous genres.
La bonne nouvelle est donc que nous savons ce qu'il nous reste à faire. La mauvaise est qu'à l'inverse de la grande majorité de leurs homologues à travers l'Europe et le monde, les dirigeants français n'ont pas le courage politique suffisant pour mettre en œuvre ces mesures de bon sens. Quel gâchis…
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
Revenons sur cette liste des freins à la croissance qui n'est malheureusement pas exhaustive.
1. Le matraquage fiscal est devenu confiscatoire. Avec un taux de prélèvements obligatoires de plus de 46 % du PIB, la France a conforté son titre de champion du monde de la fiscalité. Le gouvernement lui-même commence à admettre l'idée d'un ras-le-bol fiscal. Pourtant, il continue d'augmenter la pression fiscale. A croire qu'il souffre d'une véritable crise de schizophrénie. Et c'est bien là que le bât blesse. Car, à force de ponctionner les entreprises et les ménages, tout en augmentant les dépenses publiques de fonctionnement, le gouvernement est en train de casser la corde qui permettait aux entreprises de continuer à investir et à embaucher malgré une pression fiscale et réglementaire prohibitive.
2. La crise de la dette publique est toujours bien présente. Et pour cause : depuis désormais six ans, la croissance française est insuffisante ne serait-ce que pour rembourser les intérêts de la dette publique. Ainsi, simplement pour payer ces derniers, l'Etat doit encore augmenter sa dette déjà pléthorique. C'est ce que l'on appelle la « bulle de la dette » qui traduit le fait que cette dernière s'autoalimente. A ce rythme, la dette publique atteindra 100 % du PIB courant 2014, suscitant une augmentation des taux d'intérêt des obligations d'Etat.
3. Il s'agit là du troisième frein à la croissance. Après avoir atteint des planchers historiques, permettant de limiter le déficit public, les taux d'intérêt des obligations d'Etat ont déjà repris le chemin de la hausse depuis le printemps dernier. A quasiment 2,5 % aujourd'hui, ils devraient même se rapprocher des 3 % d'ici novembre, lorsque le gouvernement devra reconnaître que le déficit public sera supérieur aux 4,1 % du PIB en 2013 et toujours proche des 4 % en 2014. En plus d'augmenter le coût de la dette publique, cette augmentation des taux d'intérêt cassera l'investissement, l'emploi et la consommation.
4. A plus de 1,35 dollar pour un euro, la devise européenne reste beaucoup trop forte. Le niveau d'équilibre de l'euro/dollar (en fonction des fondamentaux économiques) est de 1,15 dollar pour l'ensemble de l'UEM. Pis, il est de 1,05 pour la France. Il faut donc être réaliste : tant que l'euro ne passera pas sous les 1,20 dollar, la croissance ne pourra redémarrer significativement et durablement.
5. Dans le contexte global d'une croissance faible engendrée par ces quatre handicaps, la confiance des entreprises et des ménages va rester faible. Certes, les indicateurs INSEE du moral des industriels et des particuliers se sont légèrement redressés ces derniers mois. Ils restent cependant toujours inférieurs à leur moyenne de longue période et montrent que les acteurs économiques français restent particulièrement inquiets, en particulier sur le front de la fiscalité et du chômage.
Pour conclure, n'en déplaise au gouvernement, mais surtout à l'ensemble des Français, l'atonie économique hexagonale n'est pas terminée. En fait, l'économie nationale s'est engluée dans un cercle vicieux dramatique : désinvestissement-chômage-baisse de la consommation-croissance molle…
Bien pire, l'augmentation de la pression fiscale et le maintien d'un euro trop fort vont alourdir la facture, ou plutôt la « fracture ». Et ce ne sont évidemment pas les artifices tels que les emplois d'avenir ou le CICE qui vont inverser significativement la tendance. Au total, la croissance pourra se stabiliser entre 0 et 1 % au moins jusqu'à la fin 2014, ce qui est très loin d'une vraie reprise qui ne commencerait vraiment qu'à partir d'une progression annuelle du PIB de 2 %.
Le vrai problème est qu'avec une croissance structurelle (c'est-à-dire celle obtenue lors d'un fonctionnement normal de l'économie) de seulement 0,8 %, l'atteinte de la barre des 2 % est devenue inenvisageable. Du moins tant que la France refusera d'engager de véritables réformes structurelles, telles que la baisse de la pression fiscale pour tous (entreprises et ménages), la réduction des dépenses publiques vers un niveau plus efficace de 50 % du PIB (contre 57,1 % actuellement), sans oublier la diminution du coût du travail et des rigidités réglementaires en tous genres.
La bonne nouvelle est donc que nous savons ce qu'il nous reste à faire. La mauvaise est qu'à l'inverse de la grande majorité de leurs homologues à travers l'Europe et le monde, les dirigeants français n'ont pas le courage politique suffisant pour mettre en œuvre ces mesures de bon sens. Quel gâchis…
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
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