Dans le cas présent, il s'agit de la création d'un « conseil stratégique de la dépense publique », d'un « observatoire des contreparties », d'un « conseil de l'attractivité » et d'un « conseil de simplification ». Rien que ça. Cela en devient presque risible, mais surtout triste : pour décider de baisser les dépenses, on commence par les augmenter. De même, pour simplifier la vie des Français et notamment des entreprises, on propose un « pacte de responsabilité » qui est tout sauf simple. Et pour cause : la baisse des charges qui pèsent sur les salaires sera conditionnée à des créations d'emplois. Mais lesquelles ? Dans quelle proportion ? Que va devenir le tout aussi complexe CICE qui apparaît d'ores et déjà mort-né ? Bref, pourquoi faire simple quand on peut faire compliquer ?
A ce titre, les prédécesseurs de François Hollande et de son gouvernement n'ont d'ailleurs aucune leçon à leur donner. En effet, cela fait vingt ans que la dépense publique ne cesse de croître bien plus que le PIB et les innombrables déclarations, lois, commissions, rapports… censés inverser cette tendance dramatique pourraient remplir un dictionnaire.
Dire une telle réalité n'est absolument pas du « French ou du Hollande bashing », mais cela relève simplement du ras-le-bol de plus en plus de citoyens qui aimeraient que leur pays prenne enfin le bon chemin, avant qu'il ne soit vraiment trop tard.
Bien sûr, tout le monde aimerait croire que le vrai et bon changement est pour demain. Malheureusement, après tant d'années de déception et le flou artistique qui entoure les dernières annonces, nous sommes contraints de rester circonspects.
Et ce, d'autant que la volonté affichée par le Président français est très éloignée de celle dont avait fait preuve Gherard Schröder ou Tony Blair en leurs temps. Car pour convaincre ses concitoyens, il faut d'abord être convaincu soi-même, apparaître comme tel et faire preuve d'une force de persuasion sans faille. Cet engouement irréprochable est particulièrement indispensable dans l'Hexagone où le peu de culture économique de la grande majorité de Français se résume souvent à celle de la lutte des classes.
Les réactions politiques qui ont suivi les annonces du Président montrent d'ailleurs l'ampleur des dégâts. « Insuffisant » pour l'opposition, qui, en dix ans, n'a pourtant pas réussi à réaliser un dixième de ce qui est annoncé aujourd'hui. « Trop libéral » pour les syndicats et même pour certains membres de la majorité actuelle.
Pour éviter de telles querelles, il aurait été préférable, comme nous le défendons régulièrement, d'abaisser sans conditions les charges et les impôts qui pèsent sur les entreprises (par exemple l'impôt sur les sociétés), tout en réduisant la pression fiscale qui pèse sur les ménages (par exemple la CSG, qui, rappelons-le, était un impôt temporaire créé par Michel Rocard en 1991…). Le problème est que pour engager un programme aussi ambitieux, il faut avoir le courage de baisser drastiquement la dépense publique. Or, en dépit des effets de manche du Président, il y a fort à parier que le poids de cette dernière continuera d'augmenter dans les prochaines années.
Parallèlement, prendre des mesures à l'horizon 2017 alors que la France a besoin d'un électrochoc depuis au moins dix ans relève de la gageure et montre la faible crédibilité du programme annoncé.
Sans attendre 2017, ni même la fin 2014, une première échéance déterminante se profile pour le 24 janvier, date à laquelle Moody's devrait encore dégrader la note de la France. Le Président pense-t-il raisonnablement que les mesures présentées le 14 janvier suffiront à endiguer l'augmentation à venir des taux d'intérêt obligataires et à empêcher la rechute de l'économie française qu'annoncent déjà les indicateurs des directeurs d'achat depuis trois mois ?
Peut-être, mais ce ne sera évidemment pas le cas. De même, lorsque François Hollande défend qu'il fait bon vivre en France et que les Français sont jalousés par la grande majorité des autres terriens, il faudrait peut-être qu'il descende de son nuage ou du moins qu'il vive quelques jours dans une cité HLM où les tensions sociales et ethniques sont de plus en plus catastrophiques, qu'il passe un peu de temps dans une des nombreuses entreprises hexagonales en cessation de paiement, ou alors qu'il se rapproche des nombreux Français exilés à travers la planète et qui ne veulent plus revenir dans leur douce France, non par manque de patriotisme, mais par peur de ce qui les attend à leur retour.
Ah, le déni de réalité a vraiment la vie longue… Or, pour pouvoir résoudre un problème, il faut d'abord l'identifier précisément, le reconnaître en toute honnêteté et l'accepter. C'est alors que le traitement peut commencer, avec en ligne de mire une guérison définitive. La plupart de nos partenaires européens et internationaux l'ont compris. Il est grand temps que les dirigeants politiques français le comprennent aussi. A moins qu'ils n'y aient pas intérêt. C'est bien cela le nœud du problème : à qui profite le crime ? Tant que les politiciens français n'auront pour seule ambition que d'être élus et réélus, le changement constamment promis depuis trente ans restera un grand bluff…
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
A ce titre, les prédécesseurs de François Hollande et de son gouvernement n'ont d'ailleurs aucune leçon à leur donner. En effet, cela fait vingt ans que la dépense publique ne cesse de croître bien plus que le PIB et les innombrables déclarations, lois, commissions, rapports… censés inverser cette tendance dramatique pourraient remplir un dictionnaire.
Dire une telle réalité n'est absolument pas du « French ou du Hollande bashing », mais cela relève simplement du ras-le-bol de plus en plus de citoyens qui aimeraient que leur pays prenne enfin le bon chemin, avant qu'il ne soit vraiment trop tard.
Bien sûr, tout le monde aimerait croire que le vrai et bon changement est pour demain. Malheureusement, après tant d'années de déception et le flou artistique qui entoure les dernières annonces, nous sommes contraints de rester circonspects.
Et ce, d'autant que la volonté affichée par le Président français est très éloignée de celle dont avait fait preuve Gherard Schröder ou Tony Blair en leurs temps. Car pour convaincre ses concitoyens, il faut d'abord être convaincu soi-même, apparaître comme tel et faire preuve d'une force de persuasion sans faille. Cet engouement irréprochable est particulièrement indispensable dans l'Hexagone où le peu de culture économique de la grande majorité de Français se résume souvent à celle de la lutte des classes.
Les réactions politiques qui ont suivi les annonces du Président montrent d'ailleurs l'ampleur des dégâts. « Insuffisant » pour l'opposition, qui, en dix ans, n'a pourtant pas réussi à réaliser un dixième de ce qui est annoncé aujourd'hui. « Trop libéral » pour les syndicats et même pour certains membres de la majorité actuelle.
Pour éviter de telles querelles, il aurait été préférable, comme nous le défendons régulièrement, d'abaisser sans conditions les charges et les impôts qui pèsent sur les entreprises (par exemple l'impôt sur les sociétés), tout en réduisant la pression fiscale qui pèse sur les ménages (par exemple la CSG, qui, rappelons-le, était un impôt temporaire créé par Michel Rocard en 1991…). Le problème est que pour engager un programme aussi ambitieux, il faut avoir le courage de baisser drastiquement la dépense publique. Or, en dépit des effets de manche du Président, il y a fort à parier que le poids de cette dernière continuera d'augmenter dans les prochaines années.
Parallèlement, prendre des mesures à l'horizon 2017 alors que la France a besoin d'un électrochoc depuis au moins dix ans relève de la gageure et montre la faible crédibilité du programme annoncé.
Sans attendre 2017, ni même la fin 2014, une première échéance déterminante se profile pour le 24 janvier, date à laquelle Moody's devrait encore dégrader la note de la France. Le Président pense-t-il raisonnablement que les mesures présentées le 14 janvier suffiront à endiguer l'augmentation à venir des taux d'intérêt obligataires et à empêcher la rechute de l'économie française qu'annoncent déjà les indicateurs des directeurs d'achat depuis trois mois ?
Peut-être, mais ce ne sera évidemment pas le cas. De même, lorsque François Hollande défend qu'il fait bon vivre en France et que les Français sont jalousés par la grande majorité des autres terriens, il faudrait peut-être qu'il descende de son nuage ou du moins qu'il vive quelques jours dans une cité HLM où les tensions sociales et ethniques sont de plus en plus catastrophiques, qu'il passe un peu de temps dans une des nombreuses entreprises hexagonales en cessation de paiement, ou alors qu'il se rapproche des nombreux Français exilés à travers la planète et qui ne veulent plus revenir dans leur douce France, non par manque de patriotisme, mais par peur de ce qui les attend à leur retour.
Ah, le déni de réalité a vraiment la vie longue… Or, pour pouvoir résoudre un problème, il faut d'abord l'identifier précisément, le reconnaître en toute honnêteté et l'accepter. C'est alors que le traitement peut commencer, avec en ligne de mire une guérison définitive. La plupart de nos partenaires européens et internationaux l'ont compris. Il est grand temps que les dirigeants politiques français le comprennent aussi. A moins qu'ils n'y aient pas intérêt. C'est bien cela le nœud du problème : à qui profite le crime ? Tant que les politiciens français n'auront pour seule ambition que d'être élus et réélus, le changement constamment promis depuis trente ans restera un grand bluff…
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