Marc Touati
Premièrement, le Portugal a enregistré son quatrième trimestre consécutif de baisse. Après quinze ans de croissance molle, une récession dramatique en 2009 et une faible reprise en 2010, notre partenaire lusitanien s'est donc enfoncé dans une nouvelle récession catastrophique. Cette « descente aux enfers » confirme que la politique portugaise d'augmentation des dépenses publiques pendant quinze ans, puis l'accroissement des impôts depuis quelques années (qui s'est accéléré ces derniers trimestres) sont des erreurs irrécupérables. A contrario, la reprise progressive de l'économie irlandaise montre que le salut passe plutôt par une meilleure maîtrise des dépenses publiques et par le refus d'augmenter la pression fiscale. Autrement dit, la rigueur par la hausse des impôts est vouée à l'échec.
Deuxièmement, dans son communiqué de présentation de la croissance du troisième trimestre, Eurostat a tout simplement supprimé les chiffres relatifs aux évolutions trimestrielles du PIB grec au cours des dernières années. L'Institut européen s'est contenté de préciser que « plus d'informations sont disponibles sur le site web de l'office statistique grec ». Dans un contexte où la fiabilité des comptes hellènes est sujet à caution, cette annonce laisse pantois. Veut-on nous faire croire que c'est en supprimant le thermomètre que l'on va faire retomber la fièvre ?
Troisièmement, et dans le même ordre d'idée, la publication du PIB italien, qui va habituellement de pair avec celle de la zone euro et de la plupart de ses autres membres, a été tout simplement reportée. Mais là aussi, ne soyons pas dupes. En effet, dans la mesure où les progressions du PIB au troisième trimestre ont été de 0,5 % en Allemagne, de 0,4 % en France et de 0,01 % en Espagne, la réalisation d'une croissance eurolandaise de seulement 0,2 % implique une forte baisse du PIB italien. Selon toute vraisemblance, les dirigeants italiens et eurolandais ont préféré ne pas afficher la réalité des comptes tout de suite, alors que la crise italienne bat son plein. On se croirait presque revenu au temps de l'URSS où les nouvelles désagréables n'étaient annoncées qu'avec beaucoup de retard.
Quatrièmement, alors qu'ils paraissaient plutôt bien protégés contre la baisse d'activité, les Pays-Bas ont également enregistré un recul de leur PIB, en l'occurrence - 0,3 %. De quoi rappeler que, compte tenu de la crise dramatique qui touche la zone euro, aucun membre de l'UEM ne peut être épargné, y compris l'Allemagne, qui finira, elle aussi, par connaître les affres de la baisse d'activité en 2012.
Que dire alors de la France qui, pour l'instant, a été épargnée par la récession et dont le PIB a progressé de 0,4 % au troisième trimestre ? Il ne s'agit en fait que d'un répit en pleine tempête. En effet, dans un climat d'affaires déprimé, face à une crise existentielle de la zone euro et devant les menaces sur la notation de la dette publique française, la progression du PIB hexagonal au troisième trimestre ne fait qu'apporter un léger réconfort.
Ce dernier est d'ailleurs très relatif. Et ce, pour au moins trois raisons. Primo, les magiciens, oh pardon !, les statisticiens de l'INSEE ont révisé à la baisse les comptes nationaux du deuxième trimestre. Ainsi, au cours de celui-ci, le PIB français n'a pas stagné, comme annoncé initialement, mais reculé de 0,1 %. L'augmentation de 0,4 % du troisième trimestre constitue donc avant tout une correction de la faiblesse passée.
Secundo, les facteurs explicatifs de cette reprise technique sont loin d'être satisfaisants. En effet, après avoir reculé de 0,8 % au deuxième trimestre, la consommation des ménages n'a progressé que de 0,3 % au troisième. L'atonie passée n'a donc pas été compensée. De plus, après une année de redémarrage, l'investissement des entreprises est déjà reparti à la baisse, reculant de 0,3 % sur le troisième trimestre. L'économie française restera donc toujours très loin du cercle vertueux « investissement-emploi-consommation ». Il faut d'ailleurs noter qu'en dépit de l'augmentation du PIB, l'emploi a stagné au troisième trimestre. Et ce, notamment parce que l'emploi dans l'intérim a chuté de 3,3 %. Or, ce dernier est traditionnellement un indicateur avancé de l'évolution de l'emploi global. C'est dire combien les lendemains s'annoncent difficiles sur le front du marché du travail national.
Le seul avantage de cette carence est que les importations demeurent modérées, puisqu'après avoir baissé de 1,2 % au deuxième trimestre, elles n'ont progressé que de 0,3 % au troisième. C'est en grande partie ce qui a permis de limiter les dégâts sur le chiffre de variation du PIB. A l'évidence, compter sur la faiblesse des importations pour soutenir la croissance montre l'ampleur du malaise qui sévit actuellement dans l'Hexagone.
Tertio, si les meubles ont été sauvés au troisième trimestre, la sanction risque d'être beaucoup plus forte au quatrième. En effet, compte tenu de l'effondrement du climat des affaires dans l'industrie et les services depuis septembre, de l'augmentation des taux d'intérêt à long terme et des dangers qui menacent la zone euro, une baisse du PIB de l'ordre de 0,5 % devrait s'observer sur les trois derniers mois de l'année 2011. Dès lors, en dépit d'un acquis de croissance de 1,7 %, au sortir du troisième trimestre, la croissance annuelle française devrait avoisiner les 1,5 % en 2011. Mais, ce n'est pas tout, car cette baisse du PIB du quatrième trimestre suscitera un acquis de croissance négatif pour 2012, qui devait être de l'ordre de - 0,2 %. Des évolutions que seront similaires pour l'ensemble de la zone euro.
Que l'on se situe dans l'Hexagone, en Allemagne ou à l'échelle de la zone euro, il faut donc bien profiter de l'accalmie cosmétique générée par les comptes nationaux du troisième trimestre, car elle ne va pas durer…
Marc Touati
Economiste.
Directeur Général de Global Equities.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
Deuxièmement, dans son communiqué de présentation de la croissance du troisième trimestre, Eurostat a tout simplement supprimé les chiffres relatifs aux évolutions trimestrielles du PIB grec au cours des dernières années. L'Institut européen s'est contenté de préciser que « plus d'informations sont disponibles sur le site web de l'office statistique grec ». Dans un contexte où la fiabilité des comptes hellènes est sujet à caution, cette annonce laisse pantois. Veut-on nous faire croire que c'est en supprimant le thermomètre que l'on va faire retomber la fièvre ?
Troisièmement, et dans le même ordre d'idée, la publication du PIB italien, qui va habituellement de pair avec celle de la zone euro et de la plupart de ses autres membres, a été tout simplement reportée. Mais là aussi, ne soyons pas dupes. En effet, dans la mesure où les progressions du PIB au troisième trimestre ont été de 0,5 % en Allemagne, de 0,4 % en France et de 0,01 % en Espagne, la réalisation d'une croissance eurolandaise de seulement 0,2 % implique une forte baisse du PIB italien. Selon toute vraisemblance, les dirigeants italiens et eurolandais ont préféré ne pas afficher la réalité des comptes tout de suite, alors que la crise italienne bat son plein. On se croirait presque revenu au temps de l'URSS où les nouvelles désagréables n'étaient annoncées qu'avec beaucoup de retard.
Quatrièmement, alors qu'ils paraissaient plutôt bien protégés contre la baisse d'activité, les Pays-Bas ont également enregistré un recul de leur PIB, en l'occurrence - 0,3 %. De quoi rappeler que, compte tenu de la crise dramatique qui touche la zone euro, aucun membre de l'UEM ne peut être épargné, y compris l'Allemagne, qui finira, elle aussi, par connaître les affres de la baisse d'activité en 2012.
Que dire alors de la France qui, pour l'instant, a été épargnée par la récession et dont le PIB a progressé de 0,4 % au troisième trimestre ? Il ne s'agit en fait que d'un répit en pleine tempête. En effet, dans un climat d'affaires déprimé, face à une crise existentielle de la zone euro et devant les menaces sur la notation de la dette publique française, la progression du PIB hexagonal au troisième trimestre ne fait qu'apporter un léger réconfort.
Ce dernier est d'ailleurs très relatif. Et ce, pour au moins trois raisons. Primo, les magiciens, oh pardon !, les statisticiens de l'INSEE ont révisé à la baisse les comptes nationaux du deuxième trimestre. Ainsi, au cours de celui-ci, le PIB français n'a pas stagné, comme annoncé initialement, mais reculé de 0,1 %. L'augmentation de 0,4 % du troisième trimestre constitue donc avant tout une correction de la faiblesse passée.
Secundo, les facteurs explicatifs de cette reprise technique sont loin d'être satisfaisants. En effet, après avoir reculé de 0,8 % au deuxième trimestre, la consommation des ménages n'a progressé que de 0,3 % au troisième. L'atonie passée n'a donc pas été compensée. De plus, après une année de redémarrage, l'investissement des entreprises est déjà reparti à la baisse, reculant de 0,3 % sur le troisième trimestre. L'économie française restera donc toujours très loin du cercle vertueux « investissement-emploi-consommation ». Il faut d'ailleurs noter qu'en dépit de l'augmentation du PIB, l'emploi a stagné au troisième trimestre. Et ce, notamment parce que l'emploi dans l'intérim a chuté de 3,3 %. Or, ce dernier est traditionnellement un indicateur avancé de l'évolution de l'emploi global. C'est dire combien les lendemains s'annoncent difficiles sur le front du marché du travail national.
Le seul avantage de cette carence est que les importations demeurent modérées, puisqu'après avoir baissé de 1,2 % au deuxième trimestre, elles n'ont progressé que de 0,3 % au troisième. C'est en grande partie ce qui a permis de limiter les dégâts sur le chiffre de variation du PIB. A l'évidence, compter sur la faiblesse des importations pour soutenir la croissance montre l'ampleur du malaise qui sévit actuellement dans l'Hexagone.
Tertio, si les meubles ont été sauvés au troisième trimestre, la sanction risque d'être beaucoup plus forte au quatrième. En effet, compte tenu de l'effondrement du climat des affaires dans l'industrie et les services depuis septembre, de l'augmentation des taux d'intérêt à long terme et des dangers qui menacent la zone euro, une baisse du PIB de l'ordre de 0,5 % devrait s'observer sur les trois derniers mois de l'année 2011. Dès lors, en dépit d'un acquis de croissance de 1,7 %, au sortir du troisième trimestre, la croissance annuelle française devrait avoisiner les 1,5 % en 2011. Mais, ce n'est pas tout, car cette baisse du PIB du quatrième trimestre suscitera un acquis de croissance négatif pour 2012, qui devait être de l'ordre de - 0,2 %. Des évolutions que seront similaires pour l'ensemble de la zone euro.
Que l'on se situe dans l'Hexagone, en Allemagne ou à l'échelle de la zone euro, il faut donc bien profiter de l'accalmie cosmétique générée par les comptes nationaux du troisième trimestre, car elle ne va pas durer…
Marc Touati
Economiste.
Directeur Général de Global Equities.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com