Même s'ils sont évidemment très différents, tous ces tristes évènements étaient tout à fait prévisibles depuis au moins quinze ans. Encore fallait-il avoir le courage de regarder la réalité en face et de prendre les mesures adéquates suffisamment tôt.
Mais non, à cause d'un manque criant de réalisme, les dirigeants eurolandais n'ont cessé de vouloir faire croire que tout était sous contrôle. D'abord sur le front économique. Ainsi, au début des années 2000, la stratégie de Lisbonne était le leitmotiv : celle-ci annonçait que d'ici 2010, l'Union Economique et Monétaire (UEM) allait devenir la zone la plus compétitive et la plus fertile en croissance et en emplois ! A tel point que si le Royaume-Uni était encore réticent pour rejoindre l'euro, il n'allait pas tarder à tout faire pour y adhérer.
Parallèlement, grâce à cette croissance forte, les déficits publics et les dettes des Etats devaient fondre comme neige au soleil, permettant même à la dette des pays du Sud de l'Europe, et notamment de la Grèce, de baisser fortement et d'atteindre la barre présentée à l'époque comme fatidique des 60 % du PIB…
Quant à la France, elle devait devenir la locomotive économique et politique de l'Europe, loin devant l'Allemagne qui paraissait alors souffrir d'une langueur économique tenace…
Mais bien loin de ces rêves ou plutôt de ces berceuses, la réalité a été aux antipodes. Ainsi, de 2002 à aujourd'hui, la zone euro a été la lanterne rouge de la croissance mondiale, avec le Japon, qui lui a d'ailleurs dernièrement transmis sa principale maladie, à savoir la déflation. Dans ce contexte, nos amis britanniques ont non seulement continué de refuser l'euro mais se posent désormais la question de leur maintien au sein de l'Union européenne…
Dans le même temps, à l'exception notable de l'Allemagne, le chômage n'a cessé de progresser dans la grande majorité des pays de l'UEM (si ce n'est depuis deux ans) et les dettes publiques n'ont fait que flamber. Supposée être l'apanage des pays émergents d'Amérique latine ou d'Afrique, la crise de la dette s'est alors imposée dans de nombreux pays eurolandais, dont certains, et notamment la Grèce et Chypre, sont tombés dans une situation de faillite.
Et la France dans tout ça ?! Très loin d'être devenue la locomotive de l'Union, elle s'est enfoncée dans l'atonie économique, le chômage de masse et la gabegie inefficace de dépenses publiques. A l'inverse, l'Allemagne a su moderniser ses structures économiques, ce qui lui a permis de retrouver le chemin de la croissance soutenue et de la baisse durable du chômage. Elle est donc logiquement devenue la locomotive économico-politique de la zone euro, reléguant la France au statut de spectateur.
Encore plus grave, notre « douce France » est depuis environ cinq ans une des cibles du terrorisme djihadiste et ne parvient pas à endiguer cette menace. Bien entendu, face à des kamikazes, le risque zéro est impossible. Pourtant, il est toujours frappant d'apprendre qu'avant qu'ils passent à l'acte, ces extrémistes étaient tous connus des services de sécurité. Là aussi, depuis les émeutes de 2005 dans certaines banlieues françaises, il était possible d'agir en amont pour éviter les récents dérapages. Mais, malheureusement, de la même façon que les dirigeants français ont refusé de prendre des mesures économiques courageuses pour moderniser la France et lui permettre de sortir de sa léthargie, un immobilisme maladif identique a prévalu en matière de sécurité, ce qui amène à penser qu'il est peut-être désormais trop tard pour inverser la tendance.
Et c'est bien là le drame des attentats de ces dernières années. Au-delà de l'horreur humanitaire qu'ils engendrent, ils distillent un doute quant à la capacité des dirigeants français, belges et européens à circonscrire ces risques et à assurer la sécurité physique des entreprises et des citoyens. Or, sans sécurité, pas de confiance. Et sans confiance, moins d'investissement et de consommation, donc moins de croissance et plus de chômage.
Le raisonnement est malheureusement impitoyable : si déjà avec un environnement relativement sûr, la croissance en France et dans la zone euro est structurellement molle, que va-t-elle devenir avec un risque terroriste majeur ?
Attention néanmoins au piège qui consisterait à se contenter d'augmenter les dépenses publiques pour essayer de contrecarrer ce danger. Car, de la même façon que l'augmentation de ces dernières depuis plus de vingt ans a été incapable de consacrer une croissance forte, rien ne garantit qu'il n'en sera pas de même en matière sécuritaire. Autrement dit, il ne s'agit pas d'un problème de quantité de moyens publics, mais d'efficacité de ces derniers.
Il faut donc espérer qu'à la différence de leur incompétence en matière économique, les dirigeants français et européens sauront enfin tirer les leçons de leurs erreurs passées pour cesser leur déni de réalité et assurer la sécurité de l'ensemble des acteurs économiques, condition sine qua non pour retrouver le chemin de la croissance et de l'emploi.
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com;
Mais non, à cause d'un manque criant de réalisme, les dirigeants eurolandais n'ont cessé de vouloir faire croire que tout était sous contrôle. D'abord sur le front économique. Ainsi, au début des années 2000, la stratégie de Lisbonne était le leitmotiv : celle-ci annonçait que d'ici 2010, l'Union Economique et Monétaire (UEM) allait devenir la zone la plus compétitive et la plus fertile en croissance et en emplois ! A tel point que si le Royaume-Uni était encore réticent pour rejoindre l'euro, il n'allait pas tarder à tout faire pour y adhérer.
Parallèlement, grâce à cette croissance forte, les déficits publics et les dettes des Etats devaient fondre comme neige au soleil, permettant même à la dette des pays du Sud de l'Europe, et notamment de la Grèce, de baisser fortement et d'atteindre la barre présentée à l'époque comme fatidique des 60 % du PIB…
Quant à la France, elle devait devenir la locomotive économique et politique de l'Europe, loin devant l'Allemagne qui paraissait alors souffrir d'une langueur économique tenace…
Mais bien loin de ces rêves ou plutôt de ces berceuses, la réalité a été aux antipodes. Ainsi, de 2002 à aujourd'hui, la zone euro a été la lanterne rouge de la croissance mondiale, avec le Japon, qui lui a d'ailleurs dernièrement transmis sa principale maladie, à savoir la déflation. Dans ce contexte, nos amis britanniques ont non seulement continué de refuser l'euro mais se posent désormais la question de leur maintien au sein de l'Union européenne…
Dans le même temps, à l'exception notable de l'Allemagne, le chômage n'a cessé de progresser dans la grande majorité des pays de l'UEM (si ce n'est depuis deux ans) et les dettes publiques n'ont fait que flamber. Supposée être l'apanage des pays émergents d'Amérique latine ou d'Afrique, la crise de la dette s'est alors imposée dans de nombreux pays eurolandais, dont certains, et notamment la Grèce et Chypre, sont tombés dans une situation de faillite.
Et la France dans tout ça ?! Très loin d'être devenue la locomotive de l'Union, elle s'est enfoncée dans l'atonie économique, le chômage de masse et la gabegie inefficace de dépenses publiques. A l'inverse, l'Allemagne a su moderniser ses structures économiques, ce qui lui a permis de retrouver le chemin de la croissance soutenue et de la baisse durable du chômage. Elle est donc logiquement devenue la locomotive économico-politique de la zone euro, reléguant la France au statut de spectateur.
Encore plus grave, notre « douce France » est depuis environ cinq ans une des cibles du terrorisme djihadiste et ne parvient pas à endiguer cette menace. Bien entendu, face à des kamikazes, le risque zéro est impossible. Pourtant, il est toujours frappant d'apprendre qu'avant qu'ils passent à l'acte, ces extrémistes étaient tous connus des services de sécurité. Là aussi, depuis les émeutes de 2005 dans certaines banlieues françaises, il était possible d'agir en amont pour éviter les récents dérapages. Mais, malheureusement, de la même façon que les dirigeants français ont refusé de prendre des mesures économiques courageuses pour moderniser la France et lui permettre de sortir de sa léthargie, un immobilisme maladif identique a prévalu en matière de sécurité, ce qui amène à penser qu'il est peut-être désormais trop tard pour inverser la tendance.
Et c'est bien là le drame des attentats de ces dernières années. Au-delà de l'horreur humanitaire qu'ils engendrent, ils distillent un doute quant à la capacité des dirigeants français, belges et européens à circonscrire ces risques et à assurer la sécurité physique des entreprises et des citoyens. Or, sans sécurité, pas de confiance. Et sans confiance, moins d'investissement et de consommation, donc moins de croissance et plus de chômage.
Le raisonnement est malheureusement impitoyable : si déjà avec un environnement relativement sûr, la croissance en France et dans la zone euro est structurellement molle, que va-t-elle devenir avec un risque terroriste majeur ?
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