Marc Touati
En effet, il faut savoir que de 1980 à 2009, la croissance annuelle moyenne du PIB mondial n'a été que de 3,3 %. Autrement dit, en 2010, l'économie planétaire a franchi une nouvelle étape : faire mieux que par le passé.
D'où une question : cette performance est-elle le simple fruit d'un effet de rattrapage, voire d'une nouvelle bulle ou constitue-t-elle une nouvelle norme ?
Comme il y a un an, « un certain consensus » s'impose pour annoncer le retour imminent de la « forte inflation », qui sonnera le glas de le reprise. D'abord, dans le monde émergent, puis par contagion, dans l'ensemble des pays occidentaux. Dans ce cadre, le rebond de 2010 relèverait avant tout d'une bulle, alimentée par le caractère excessivement accomodant des politiques de relance monétaire et budgétaire menées à travers le monde. 2011 ne serait donc pas l'année de la confirmation, mais celle du dégonflement de cette bulle.
Nous ne partageons absolument pas ce sentiment. En effet, l'actuel rebond inflationniste observé dans le monde émergent est tout à fait normal. Il ne fait qu'accompagner la vigueur de l'activité économique.
De plus, la Chine va s'employer, cette année, à éviter la surchauffe. Elle va donc remonter ses taux d'intérêt (comme elle l'a d'ailleurs déjà fait cette semaine) et également apprécier le yuan. Selon nous, ce dernier passera de 6,58 yuans pour un dollar actuellement à 6,20 en fin d'année et 5,5 fin 2012. De la sorte, la Chine ralentira légèrement, tout en bénéficiant d'une désinflation importée conséquente. Sa croissance économique devrait ainsi se stabiliser vers les 9,5 % et son inflation autour des 4 %.
Ce mouvement de désinflation chinois se répercutera sur l'ensemble des pays émergents, puis sur les pays dits développés.
Et c'est bien là que réside la principale erreur des Cassandre qui annoncent depuis deux ans le retour de l'hyperinflation, en vain. En l'occurrence, le fait que les pays dits émergents sont beaucoup plus réactifs que les pays dits développés.
Autrement dit, ils ont très bien compris que l'inflation devait être maîtrisée sans pour autant sacrifier la croissance économique.
Dans ce cadre, il faudra s'habituer à une croissance mondiale proche des 4 % au moins jusqu'en 2012. Cette dernière restera tirée par la Chine, l'Inde et l'ensemble des autres pays « émergés ».
Les Etats-Unis résisteront tant bien que mal, avec une croissance autour des 3,2 % cette année et l'an prochain.
Quant à la zone euro, elle restera à la traîne, avec une progression de son PIB voisine de son niveau structurel, à savoir entre 1,7 % et 2 %.
Et contrairement à ce que veulent laisser croire certains esprits bien pensants, la crise de la dette publique eurolandaise est toujours loin d'être réglée. C'est du moins ce que montre le niveau toujours élevé des spreads de taux longs vis-à-vis de l'Allemagne.
En fait, 2011 devrait constituer une année de répit, notamment grâce à la baisse probable de l'euro/dollar. Quant à 2012, elle sera certainement l'année de « vérité ». Dès le printemps, la France devra effectivement faire des choix politiques majeurs qui engageront l'avenir du couple franco-allemand et par là même celui de la zone euro.
Quelques mois plus tard, ce sera autour de l'Oncle Sam de choisir sa stratégie pour les années à venir. On comprend dès lors que l'Administration américaine sera peut-être moins encline à se priver de l'arme du dollar faible. Autrement dit, 2012 ne devrait pas constituer une année où les jeux coopératifs seront favorisés.
En conclusion, sans être une bulle, la croissance mondiale de 5 % de 2010 provient principalement d'un effet de rattrapage qui devrait s'atténuer en 2011. Selon nos estimations, le PIB planétaire devrait ainsi croître d'environ 4,2 % cette année, niveau qui pourrait désormais constituer une performance structurelle pour l'économie internationale, c'est-à-dire durable sans excès inflationniste.
Marc Touati
Economiste.
Directeur Général de Global Equities.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
D'où une question : cette performance est-elle le simple fruit d'un effet de rattrapage, voire d'une nouvelle bulle ou constitue-t-elle une nouvelle norme ?
Comme il y a un an, « un certain consensus » s'impose pour annoncer le retour imminent de la « forte inflation », qui sonnera le glas de le reprise. D'abord, dans le monde émergent, puis par contagion, dans l'ensemble des pays occidentaux. Dans ce cadre, le rebond de 2010 relèverait avant tout d'une bulle, alimentée par le caractère excessivement accomodant des politiques de relance monétaire et budgétaire menées à travers le monde. 2011 ne serait donc pas l'année de la confirmation, mais celle du dégonflement de cette bulle.
Nous ne partageons absolument pas ce sentiment. En effet, l'actuel rebond inflationniste observé dans le monde émergent est tout à fait normal. Il ne fait qu'accompagner la vigueur de l'activité économique.
De plus, la Chine va s'employer, cette année, à éviter la surchauffe. Elle va donc remonter ses taux d'intérêt (comme elle l'a d'ailleurs déjà fait cette semaine) et également apprécier le yuan. Selon nous, ce dernier passera de 6,58 yuans pour un dollar actuellement à 6,20 en fin d'année et 5,5 fin 2012. De la sorte, la Chine ralentira légèrement, tout en bénéficiant d'une désinflation importée conséquente. Sa croissance économique devrait ainsi se stabiliser vers les 9,5 % et son inflation autour des 4 %.
Ce mouvement de désinflation chinois se répercutera sur l'ensemble des pays émergents, puis sur les pays dits développés.
Et c'est bien là que réside la principale erreur des Cassandre qui annoncent depuis deux ans le retour de l'hyperinflation, en vain. En l'occurrence, le fait que les pays dits émergents sont beaucoup plus réactifs que les pays dits développés.
Autrement dit, ils ont très bien compris que l'inflation devait être maîtrisée sans pour autant sacrifier la croissance économique.
Dans ce cadre, il faudra s'habituer à une croissance mondiale proche des 4 % au moins jusqu'en 2012. Cette dernière restera tirée par la Chine, l'Inde et l'ensemble des autres pays « émergés ».
Les Etats-Unis résisteront tant bien que mal, avec une croissance autour des 3,2 % cette année et l'an prochain.
Quant à la zone euro, elle restera à la traîne, avec une progression de son PIB voisine de son niveau structurel, à savoir entre 1,7 % et 2 %.
Et contrairement à ce que veulent laisser croire certains esprits bien pensants, la crise de la dette publique eurolandaise est toujours loin d'être réglée. C'est du moins ce que montre le niveau toujours élevé des spreads de taux longs vis-à-vis de l'Allemagne.
En fait, 2011 devrait constituer une année de répit, notamment grâce à la baisse probable de l'euro/dollar. Quant à 2012, elle sera certainement l'année de « vérité ». Dès le printemps, la France devra effectivement faire des choix politiques majeurs qui engageront l'avenir du couple franco-allemand et par là même celui de la zone euro.
Quelques mois plus tard, ce sera autour de l'Oncle Sam de choisir sa stratégie pour les années à venir. On comprend dès lors que l'Administration américaine sera peut-être moins encline à se priver de l'arme du dollar faible. Autrement dit, 2012 ne devrait pas constituer une année où les jeux coopératifs seront favorisés.
En conclusion, sans être une bulle, la croissance mondiale de 5 % de 2010 provient principalement d'un effet de rattrapage qui devrait s'atténuer en 2011. Selon nos estimations, le PIB planétaire devrait ainsi croître d'environ 4,2 % cette année, niveau qui pourrait désormais constituer une performance structurelle pour l'économie internationale, c'est-à-dire durable sans excès inflationniste.
Marc Touati
Economiste.
Directeur Général de Global Equities.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com