Et pourtant ! 25 ans plus tard, force est de constater que tous ces espoirs ont été vains. D'abord sur le front des résultats économiques. En 1992, la zone euro actuelle (c'est-à-dire avec ses 19 pays membres) représentait 21 % du PIB mondial, soit seulement un point de moins que les Etats-Unis et 17 points de plus que la Chine. Aujourd'hui, son poids dans la richesse mondiale est tombé à 11 %, contre 16 % pour l'Oncle Sam et 18 % pour l'Empire du milieu. Dans le même temps, sa croissance structurelle (c'est-à-dire celle qui s'observe lors d'un fonctionnement normal de l'économie) est passée de 2,5 % à 0,8 %, tandis que celle des Etats-Unis est restée globalement stable à 2,5 %. Encore plus triste, son taux de chômage structurel est passé de 9 % à 10,5 % et sa dette publique de 60 % à 92 %.
Mais, au-delà de ces échecs, le plus cuisant réside dans l'incapacité des Européens à créer une véritable zone monétaire optimale. En effet, bien loin des engagements du Traité en matière d'harmonisation, les dirigeants ont préféré agrandir la zone euro avec aujourd'hui 19 pays, dont les structures économiques sont de plus en plus différentes, voire divergentes. Autrement dit, avant de consolider les fondations de la zone euro, ses dirigeants ont voulu directement construire le troisième étage. Si bien que l'UEM est inévitablement devenue une tour de Pise.
Pour ne rien arranger, le seul organe supranational disposant d'un véritable pouvoir économique dans l'UEM, en l'occurrence la BCE, a appliqué une stratégie rétrograde et, par là-même, suicidaire. En effet, plutôt que de favoriser la croissance et l'emploi, elle a préféré lutter contre une inflation qui n'existait pas. A tel point qu'elle a fini par engendrer le pire des maux économiques, à savoir la déflation.
Ce n'est qu'avec l'arrivée de Mario Draghi à la tête de la BCE en novembre 2011, soit douze ans après la création de la monnaie unique, que la donne a changé et que le dogmatisme maladif a enfin laissé la place au pragmatisme. Mais malheureusement, il était déjà trop tard. Trop tard en particulier pour les pays du Sud de l'Europe qui sont tombés dans une crise sociétale, qui n'est toujours pas terminée. Les chiffres sont sans appel : comparativement à son niveau du début 2008, le PIB actuel affiche encore un repli de 1,8 % en Espagne, 4,8 % au Portugal, 7,7 % en Italie et 26,6 % en Grèce. Cette dernière est d'ailleurs toujours dans l'œil du cyclone, avec une stagnation économique, un taux de chômage de 23 % et une dette de plus de 180 % du PIB.
Dans ce cadre, si Super Mario a sauvé la zone euro, il n'a fait que gagner du temps. Car comme je l'ai écrit à maintes reprises depuis des années, l'UEM ne peut perdurer sans union fédérale et politique. L'Histoire de l'Humanité nous l'a montré. De toutes les nombreuses tentatives d'union monétaire qui ont jalonné celle-ci, les seules qui ont survécu sont celles qui ont été finalisées par une union monétaire, à l'image de l'Allemagne, des Etats-Unis ou encore du Brésil.
Le drame est que, depuis quelques années, les peuples de la zone euro et aussi leurs dirigeants sont devenus de plus en plus réticents à l'idée d'une union fédérale. Encore plus grave : un sentiment europhobe se répand comme un virus et gagne de plus en plus de pays et de citoyens. La raison de ce rejet est finalement assez simple : depuis des décennies, les dirigeants des pays européens, principalement par manque de courage, n'ont cessé de dire à leurs populations que s'il fallait faire des efforts c'était à cause de l'Europe. Pourtant, s'il faut assainir les dépenses publiques et les rendre plus fécondes en croissance, ce n'est pas pour l'Europe mais pour nos enfants. Conséquence logique de cette erreur stratégique et historique : la construction européenne est devenue le bouc émissaire idéal et a stigmatisé toutes les rancœurs, voire les haines.
Autrement dit, non seulement l'Europe n'est pas devenue la terre de croissance et d'emploi attendue mais, en plus, dans l'inconscient collectif, elle est désormais perçue comme la mère de toutes les rigidités et de toutes les inefficacités budgétaires et économiques, avec en toile de fond un chômage de masse endémique. Même les pays qui ont réussi à moderniser leurs structures économiques, à commencer par le Royaume-Uni, mais aussi l'Allemagne sont de plus en plus sceptiques à l'égard de la construction européennes. Et si, après avoir refusé l'euro, les Britanniques ont déjà franchi le Rubicon de la sortie de l'Union, de plus en plus de pays s'en approchent dangereusement.
Il faut donc être clair : sauf si une prise de conscience miraculeuse se produit, notamment en France, afin d'engager la zone euro vers une harmonisation des conditions fiscales et réglementaires, avec un budget fédéral efficace mais aussi moins de rigidités structurelles, l'UEM telle que nous la connaissons aujourd'hui aura disparu avant 2020.
Cela ne signifiera d'ailleurs peut-être pas la fin de l'euro, mais l'avènement d'une zone monétaire plus restreinte, avec une vraie intégration, une véritable union fédérale, des règles strictes et une entraide à toute épreuve. C'était justement le but du traité de Maastricht. Dommage que les dirigeants européens ne le comprennent qu'aujourd'hui, 25 ans plus tard…
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com
Mais, au-delà de ces échecs, le plus cuisant réside dans l'incapacité des Européens à créer une véritable zone monétaire optimale. En effet, bien loin des engagements du Traité en matière d'harmonisation, les dirigeants ont préféré agrandir la zone euro avec aujourd'hui 19 pays, dont les structures économiques sont de plus en plus différentes, voire divergentes. Autrement dit, avant de consolider les fondations de la zone euro, ses dirigeants ont voulu directement construire le troisième étage. Si bien que l'UEM est inévitablement devenue une tour de Pise.
Pour ne rien arranger, le seul organe supranational disposant d'un véritable pouvoir économique dans l'UEM, en l'occurrence la BCE, a appliqué une stratégie rétrograde et, par là-même, suicidaire. En effet, plutôt que de favoriser la croissance et l'emploi, elle a préféré lutter contre une inflation qui n'existait pas. A tel point qu'elle a fini par engendrer le pire des maux économiques, à savoir la déflation.
Ce n'est qu'avec l'arrivée de Mario Draghi à la tête de la BCE en novembre 2011, soit douze ans après la création de la monnaie unique, que la donne a changé et que le dogmatisme maladif a enfin laissé la place au pragmatisme. Mais malheureusement, il était déjà trop tard. Trop tard en particulier pour les pays du Sud de l'Europe qui sont tombés dans une crise sociétale, qui n'est toujours pas terminée. Les chiffres sont sans appel : comparativement à son niveau du début 2008, le PIB actuel affiche encore un repli de 1,8 % en Espagne, 4,8 % au Portugal, 7,7 % en Italie et 26,6 % en Grèce. Cette dernière est d'ailleurs toujours dans l'œil du cyclone, avec une stagnation économique, un taux de chômage de 23 % et une dette de plus de 180 % du PIB.
Dans ce cadre, si Super Mario a sauvé la zone euro, il n'a fait que gagner du temps. Car comme je l'ai écrit à maintes reprises depuis des années, l'UEM ne peut perdurer sans union fédérale et politique. L'Histoire de l'Humanité nous l'a montré. De toutes les nombreuses tentatives d'union monétaire qui ont jalonné celle-ci, les seules qui ont survécu sont celles qui ont été finalisées par une union monétaire, à l'image de l'Allemagne, des Etats-Unis ou encore du Brésil.
Le drame est que, depuis quelques années, les peuples de la zone euro et aussi leurs dirigeants sont devenus de plus en plus réticents à l'idée d'une union fédérale. Encore plus grave : un sentiment europhobe se répand comme un virus et gagne de plus en plus de pays et de citoyens. La raison de ce rejet est finalement assez simple : depuis des décennies, les dirigeants des pays européens, principalement par manque de courage, n'ont cessé de dire à leurs populations que s'il fallait faire des efforts c'était à cause de l'Europe. Pourtant, s'il faut assainir les dépenses publiques et les rendre plus fécondes en croissance, ce n'est pas pour l'Europe mais pour nos enfants. Conséquence logique de cette erreur stratégique et historique : la construction européenne est devenue le bouc émissaire idéal et a stigmatisé toutes les rancœurs, voire les haines.
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