Réforme du droit des obligations : les nouvelles actions interrogatoires

L’ordonnance n°2016-131 du 10 février 2016, entrée en vigueur le 1er octobre dernier, a modifié très profondément le droit des obligations.


Philippe Touzet
Si les nouvelles dispositions ne s’appliqueront qu'aux contrats signés après le 1er octobre 2016, l’ordonnance crée trois actions «interrogatoires» qui pourront être appliquées immédiatement, y compris aux contrats en cours.

L’action interrogatoire a pour but de forcer une partie (ou un tiers) à prendre position sur une situation juridique donnée. L’idée est soit de lever une incertitude, soit de forcer la partie ou le tiers qui bénéficie d’un délai pour agir à prendre une décision immédiate.

Les trois nouvelles actions créées par l'ordonnance du 10 février 2016 sont les suivantes :

1. Nullité du contrat : le nouvel article 1183 du Code civil permet de purger certaines nullités contractuelles. En présence d’un contrat affecté d’une potentielle nullité (et à condition que ladite cause de nullité ait par la suite disparu), une partie peut désormais imposer à l’autre de prendre position en lui demandant d'indiquer si elle entend ou non s'en prévaloir.

Dans les 6 mois (délai fixe et non modulable) de la sommation, la partie qui pourrait invoquer la nullité doit soit confirmer le contrat, soit agir en nullité.

À défaut de réponse dans ce délai, le contrat « sera réputé confirmé ».

2. Pouvoir du représentant : Le nouvel article 1158 du Code civil permet à une partie qui doute de l’étendue des pouvoirs du représentant (mandataire, administrateur...) de son cocontractant, de se les faire confirmer par écrit par le représenté.

À défaut de réponse dans un certain délai, le mandant perd la possibilité de contester l’acte par la suite : « le représentant est réputé habilité à conclure cet acte. »

3. Pacte de préférence : Le nouvel article 1123 du Code civil prévoit la possibilité pour un tiers de demander par écrit au bénéficiaire d’un pacte de préférence de confirmer ou d’infirmer l’existence du pacte, et de dire s’il entend s’en prévaloir.

L’objet de cette action est de permettre la conclusion d’un contrat juridiquement sûr, malgré le pacte précédemment conclu.

À défaut de réponse dans un certain délai, le bénéficiaire ne pourra plus invoquer le pacte dont il bénéficiait : il « ne pourra plus solliciter sa substitution au contrat conclu avec le tiers ou la nullité du contrat. »

Reste à savoir comment seront accueillies par la pratique ces nouvelles actions, qui viennent tout juste d'entrer en vigueur.

Une difficulté doit toutefois être d'ores et déjà signalée : les nouveaux articles 1123 et 1158 du Code civil ne précisent pas dans quel délai la partie interrogée doit répondre, laissant le soin à la personne qui met en œuvre l'action interrogatoire de fixer elle même ce délai, avec pour seule précision qu'il doit être "raisonnable". Il appartiendra à la jurisprudence de préciser cette notion de délai raisonnable, ce qui promet un abondant contentieux.

Philippe Touzet
Avocat à la Cour d'appel de Paris
Cabinet Touzet Bocquet & Associés
Société d’avocats – 7, Avenue de la Grande Armée 75116 Paris
www.touzet-bocquet.com

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Jeudi 13 Octobre 2016


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