Lundi 30 Janvier 2023
Laurent Leloup

Où vont les bénéfices ?

Lettre du vendredi 27 janvier 2023 rédigée par Eric Galiègue - Analyste financier indépendant, Président de VALQUANT EXPERTYSE SAS.


Les publications des comptes des entreprises pour l’exercice 2022 a commencé. Elles confirment en général que 2022 a été un très bon cru, et que l’année 2023 devrait être plus difficile ; on évoquera bien sur Microsoft, mais aussi LVMH et TESLA. La mesure agrégée des résultats des entreprises est complexe, et comme toute statistique, « on peut leur faire dire ce que l’on veut ». Où est la vérité ? Nous croyons utile de revenir sur ce sujet majeur en général, et particulièrement pour l’année qui vient de commencer. La mesure du bénéfice est en soi difficile. Nous ne parlerons pas de la problématique comptable, et de la réalité de la représentation « sincère et fidèle » des comptes. C’est un sujet extrêmement important, mais nous nous limiterons ici à la mesure des bénéfices supposés « sincères » en fonction du temps. Habituellement, la mesure de la croissance est réalisée d’un exercice sur l’autre. En effet, la croissance du BPA annuel 2023 vs 2022, n’a pas la même signification en janvier, qu’en décembre. Entre deux, onze mois se seront écoulés, et on pensera forcément à la perspective 2024 plus en fin d’année 2023, qu’au début…

La mesure qui nous semble la plus adaptée à la comparaison avec les cours boursiers, est le bénéfice prospectif anticipé par le consensus des analystes financiers. Le bénéfice prospectif, comme son nom l’indique, se projette « un an devant », c’est-à-dire qu’il prend en compte les 12 prochains mois. Ainsi, fin janvier, le bénéfice prospectif prend en compte 11 mois de l’exercice calendaire 2023, et 1 mois de l’exercice calendaire 2024 ; fin février, le bénéfice prospectif prendra en compte 10 mois de 2023, et 2 mois de 2024, et ainsi de suite. Cette mesure a l’avantage de prendre en compte le déroulement du temps, ce qui n’est pas le cas des mesures de croissance d’un exercice à l’autre.

Aujourd’hui, la croissance des bénéfices des entreprises du S&P 500 anticipée par les analystes financiers, est de 5,4% pour 2022, de 4% pour 2023 et de 10,6 % pour 2024. Le bénéfice anticipé pour l’exercice 2023 a été révisé en baisse de 9% depuis le mois de juin dernier, comme d’ailleurs les anticipations du bénéfice pour l’exercice 2022. Le bénéfice prospectif a baissé quant à lui, de 4% environ : la prise en compte progressive du niveau du bénéfice de l’exercice suivant, a limité l’impact sur le BPA Prospectif, de la révision en baisse des exercices 2022 et 2023.

En Europe (Euro Stoxx), où le poids des pétrolières et des bancaires est plus important, le bénéfice 2022 est en hausse de 13,6%, le bénéfice 2023 de 2%, et le bénéfice 2024 de 9,6%. Le bénéfice 2022 a été révisé en baisse de 1% depuis un mois, et le bénéfice prospectif a baissé lui aussi de 1% depuis son plus haut atteint en novembre 2022.

Dans les deux cas, des deux côtés de l’Atlantique, les bénéfices semblent faire une simple pause, sans même baisser, en 2022 et 2023, avant de progresser à nouveau en 2024 précisément au rythme des 12 dernières années, 10,5 % aux USA, un peu moins en Europe. La résilience des entreprises en dépit d’un contexte pour le moins compliqué est remarquable, et explique le retour du cours des actions européennes au plus haut historique. On assisterait ainsi à une simple petite baisse des marges, de l’ordre de 0,5%, mais qui demeureraient proches de leurs plus hauts (un peu moins de 11% aux USA, un peu plus de 10% en Europe).
Rappelons que le contexte actuel est défavorable à la formation des bénéfices. Parmi les éléments de contexte :
1/ la croissance économique générale est en fort ralentissement. Les conjoncturistes sont eux aussi surpris par la résilience des économies face à un choc énergétique important et à la hausse des taux. Manifestement, l’économie profite des mesures étatiques prises pour compenser la baisse de pouvoir d’achat des ménages. Elle bénéficie aussi du comportement des ménages, qui n’hésitent pas à puiser dans leur épargne et même à s’endetter pour ne pas réduire leur consommation.
2/ les perturbations de la chaine logistiques, pénuries et autres ruptures de stocks n’ont pas traumatisé les entreprises, en tous cas les grandes entreprises cotées.
3/ Manifestement l’inflation n’a pas eu un impact négatif sur les profits des entreprises en 2022 ; les salaires ont cru moins fortement que les prix de vente. C’est plutôt en 2023 qu’un effet de ciseau peut être craint, les salaires continuant à progresser, alors que l’inflation (des prix de vente) devrait se réduite tendanciellement…


Recommandation investisseurs : nous sommes toujours en forte sous-pondération des actions pour un CAC 40 supérieur à 5 650 points.

Tendance sur les marchés de taux et de devises : Les taux des obligations d’Etat se sont stabilisé et ont remonté de 10 pb des deux côtés de l’Atlantique. L’euro se maintien au-delà de 1,09$.

Tendances récentes sur les matières premières : Le cours du pétrole reste ferme, au-delà de 86$ pour le Brent.
Eric Galiègue

Eric GALIEGUE
Analyste financier indépendant,

Président de VALQUANT EXPERTYSE SAS
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