Bruno Colmant
Depuis des mois, voire des années, plusieurs banques centrales procèdent à un gigantesque assouplissement quantitatif. L’idée est de stimuler l’inflation au travers de la création monétaire. Elles acquièrent donc des obligations souveraines en contrepartie d’une émission de monnaie. Le stock de cette dernière en est amplifié.
Mais le problème est que ces opérations n’atteignent pas leur objectif : le taux d’inflation reste faible. Ceci est expliqué par le fait que d’autres forces, relevant de l’économie réelle, contrarient ces injections monétaires : contexte déflationniste et récessionnaire, vieillissement de la population, vague de digitalisation, inégalités croissantes de revenus, etc.
Un cercle vicieux
Les banques centrales doivent néanmoins poursuivre leurs achats de titres car tout arrêt de l’assouplissement quantitatif conduirait à une hausse des taux d’intérêt qui contrarierait l’espoir d’une reprise stimulée par l’inflation. C’est à ce niveau qu’un autre problème se pose : les banques centrales sont confrontées au fait que des limites naturelles ou statutaires contraignent les achats d‘obligations souveraines. C’est ainsi que ces banques centrales acquièrent des obligations émises par des entreprises. Certaines vont même plus loin, en acquérant des actions de sociétés privées.
C’est ainsi que la Banque Nationale Suisse a acquis des actions pour 100 milliards de dollars, dont 54 milliards en actions américaines de type Apple et Coca-Cola. La Banque centrale du Japon est en train de devenir un des principaux actionnaires d’une petite centaine d’entreprises nippones cotées pour un montant approchant 100 milliards de dollars, tandis que la Banque centrale chinoise a fait de même pour contrarier les chutes de cours. Et d’aucuns supputent que la BCE pourrait faire de même.
Privatisation de la monnaie
La monnaie, qui est un bien public, est donc gagée par des titres de propriété privée. C’est intuitivement un facteur qui sous-tend la croissance des bourses. Est-ce sain ? Je ne crois pas. Ce n’est pas le rôle des banques centrales de capturer l’actionnariat privé, même sous une forme marginale, en devenant une gigantesque sicav. Bien sûr, il se trouvera quelques chercheurs pour expliquer qu’une acquisition d’actifs privés ressemble à ce que des banques commerciales effectuent et que les montants sont faibles par rapport à la capitalisation globale des actions cotées. Il n’empêche : cela ressemble d’ailleurs à une nationalisation rampante de l’économie de marché, tout en pouvant contribuer à une élévation artificielle du prix des actifs, sans imaginer ce qui se passera lorsque les banques centrales remettront ces titres sur les marchés.
Pouvons-nous d’ailleurs affirmer que nous évoluons en économie de marché lorsque des organismes publics, telles les banques centrales, jouent un tel rôle dans les circuits financiers ? Je ne le crois pas.
A propos de Degroof Petercam :
Forte de son histoire remontant à 1871, Banque Degroof Petercam est une institution financière indépendante de référence, proposant ses services à des investisseurs privés et institutionnels ainsi qu’à des organisations.
Basés à Bruxelles, nous employons 1.400 professionnels expérimentés en Belgique, au Luxembourg, en France, en Espagne, en Suisse, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, et à Hong Kong.
Nos clients bénéficient des meilleurs services possibles grâce à la combinaison unique de services alliant banque privée, gestion institutionnelle, investment banking (corporate finance et intermédiation financière) et asset services. Nous gérons plus de 50 milliards d’euros d’actifs au profit d’investisseurs particuliers et de familles, de sociétés, de fonds de pension publics et d’entreprises, des compagnies d’assurances et des organisations gouvernementales et sans but lucratif.
Présente en France depuis 2001, la Banque offre à ses clients privés et institutionnels, ainsi qu’aux entreprises, une large gamme de services dans les métiers de la gestion de fortune, de la banque d’affaires et de la gestion d’actifs. Basée à Paris et présente à Lyon, Lille et Toulouse, Degroof Petercam France emploie près de 115 professionnels.
Mais le problème est que ces opérations n’atteignent pas leur objectif : le taux d’inflation reste faible. Ceci est expliqué par le fait que d’autres forces, relevant de l’économie réelle, contrarient ces injections monétaires : contexte déflationniste et récessionnaire, vieillissement de la population, vague de digitalisation, inégalités croissantes de revenus, etc.
Un cercle vicieux
Les banques centrales doivent néanmoins poursuivre leurs achats de titres car tout arrêt de l’assouplissement quantitatif conduirait à une hausse des taux d’intérêt qui contrarierait l’espoir d’une reprise stimulée par l’inflation. C’est à ce niveau qu’un autre problème se pose : les banques centrales sont confrontées au fait que des limites naturelles ou statutaires contraignent les achats d‘obligations souveraines. C’est ainsi que ces banques centrales acquièrent des obligations émises par des entreprises. Certaines vont même plus loin, en acquérant des actions de sociétés privées.
C’est ainsi que la Banque Nationale Suisse a acquis des actions pour 100 milliards de dollars, dont 54 milliards en actions américaines de type Apple et Coca-Cola. La Banque centrale du Japon est en train de devenir un des principaux actionnaires d’une petite centaine d’entreprises nippones cotées pour un montant approchant 100 milliards de dollars, tandis que la Banque centrale chinoise a fait de même pour contrarier les chutes de cours. Et d’aucuns supputent que la BCE pourrait faire de même.
Privatisation de la monnaie
La monnaie, qui est un bien public, est donc gagée par des titres de propriété privée. C’est intuitivement un facteur qui sous-tend la croissance des bourses. Est-ce sain ? Je ne crois pas. Ce n’est pas le rôle des banques centrales de capturer l’actionnariat privé, même sous une forme marginale, en devenant une gigantesque sicav. Bien sûr, il se trouvera quelques chercheurs pour expliquer qu’une acquisition d’actifs privés ressemble à ce que des banques commerciales effectuent et que les montants sont faibles par rapport à la capitalisation globale des actions cotées. Il n’empêche : cela ressemble d’ailleurs à une nationalisation rampante de l’économie de marché, tout en pouvant contribuer à une élévation artificielle du prix des actifs, sans imaginer ce qui se passera lorsque les banques centrales remettront ces titres sur les marchés.
Pouvons-nous d’ailleurs affirmer que nous évoluons en économie de marché lorsque des organismes publics, telles les banques centrales, jouent un tel rôle dans les circuits financiers ? Je ne le crois pas.
A propos de Degroof Petercam :
Forte de son histoire remontant à 1871, Banque Degroof Petercam est une institution financière indépendante de référence, proposant ses services à des investisseurs privés et institutionnels ainsi qu’à des organisations.
Basés à Bruxelles, nous employons 1.400 professionnels expérimentés en Belgique, au Luxembourg, en France, en Espagne, en Suisse, aux Pays-Bas, en Allemagne, en Italie, et à Hong Kong.
Nos clients bénéficient des meilleurs services possibles grâce à la combinaison unique de services alliant banque privée, gestion institutionnelle, investment banking (corporate finance et intermédiation financière) et asset services. Nous gérons plus de 50 milliards d’euros d’actifs au profit d’investisseurs particuliers et de familles, de sociétés, de fonds de pension publics et d’entreprises, des compagnies d’assurances et des organisations gouvernementales et sans but lucratif.
Présente en France depuis 2001, la Banque offre à ses clients privés et institutionnels, ainsi qu’aux entreprises, une large gamme de services dans les métiers de la gestion de fortune, de la banque d’affaires et de la gestion d’actifs. Basée à Paris et présente à Lyon, Lille et Toulouse, Degroof Petercam France emploie près de 115 professionnels.
2. Les taux négatifs en pratique : des premiers résultats et des interrogations
Si elle a agi la première, la BCE n’a pas été la seule à porter l’un de ses taux de référence en territoire négatif : ainsi, la Banque nationale du Danemark (septembre 2014), la Banque Nationale Suisse (décembre 2014), la Riksbank suédoise (février 2015) et la Banque du Japon (janvier 2016) se sont chacune engagées dans cette voie, avec cependant des nuances en termes d’instruments utilisés et d’objectifs poursuivis (ancrage des anticipations d’inflation, lutte contre une appréciation excessive de la devise locale). Dans un article récent (3), la Banque des règlements internationaux (BRI) indique que la mise en œuvre de cette politique s’est très largement faite à cadre institutionnel constant. En termes de transmission, la BRI estime que les faibles taux négatifs des banques centrales se sont propagés sur les marchés monétaires, les taux à court terme « suivant le mouvement ». Elle se montre en revanche plus réservée quant à l’impact sur l’économie réelle dans la mesure où les institutions financières n’ont, jusqu’ici, pas répercuté les taux négatifs aux dépôts des particuliers (4). Les ingrédients d’un dilemme sont réunis : soit la politique des taux négatifs se diffuse, ce qui pourra difficilement se faire sans impact pour les particuliers, avec un risque potentiel de retour au « bas de laine » (5); soit elle reste partielle et, de facto, ne peut déployer ses pleins effets. A cet égard, l’expérience suisse, où des pratiques de « compensation » sur d’autres segments auraient été observées (hausse des taux sur les emprunts immobiliers), fait apparaître des contradictions qui perturbent la transmission de la politique monétaire.
3. Achats d’obligations d’entreprises : 20 % à taux négatif
Conformément à la décision prise lors de la réunion de politique monétaire de mars (voir flash éco du 10 mars 2016), l’Eurosystème a démarré l’achat d’obligations émises par le secteur privé non financier le 8 juin dernier. Partie intégrante du programme d’achat d’actifs, le « CSPP » (« Corporate sector purchase programme ») prévoit que les principales banques centrales de la zone euro (Allemagne, France, Italie, Espagne, Belgique, Finlande) procèdent à l’acquisition de titres libellés en euro de qualité « investissement ». Parmi les autres critères requis, une maturité restante comprise entre 6 mois et 30 ans au moment de l’achat. En outre, l’émetteur, qui ne peut être une institution de crédit, doit être établi au sein de la zone euro (6). Selon la BCE, l’Eurosystème avait acquis au 15 juillet 10,4Md€ d’obligations corporate dont une très large majorité (93 %) sur le marché secondaire. En termes de montants, les échanges (458 obligations recouvrant 175 émetteurs) ont avant tout concerné les transactions inférieures à 10M€ (58 %), celles comprises entre 10M€ et 50M€ constituant un tiers (34 %) et celles supérieures à 50M€ près de 10 %. La distribution sectorielle des achats fait elle apparaître la prééminence des biens de consommation et des « utilities », tandis que l’industrie n’aurait bénéficié que de moins de 10 % des achats. Enfin, dans le contexte des taux négatifs, il est intéressant de noter que 20 % des achats ont été effectués sur des rendements négatifs, supérieurs au taux de la facilité de dépôt (- 0,4 %).
Si elle a agi la première, la BCE n’a pas été la seule à porter l’un de ses taux de référence en territoire négatif : ainsi, la Banque nationale du Danemark (septembre 2014), la Banque Nationale Suisse (décembre 2014), la Riksbank suédoise (février 2015) et la Banque du Japon (janvier 2016) se sont chacune engagées dans cette voie, avec cependant des nuances en termes d’instruments utilisés et d’objectifs poursuivis (ancrage des anticipations d’inflation, lutte contre une appréciation excessive de la devise locale). Dans un article récent (3), la Banque des règlements internationaux (BRI) indique que la mise en œuvre de cette politique s’est très largement faite à cadre institutionnel constant. En termes de transmission, la BRI estime que les faibles taux négatifs des banques centrales se sont propagés sur les marchés monétaires, les taux à court terme « suivant le mouvement ». Elle se montre en revanche plus réservée quant à l’impact sur l’économie réelle dans la mesure où les institutions financières n’ont, jusqu’ici, pas répercuté les taux négatifs aux dépôts des particuliers (4). Les ingrédients d’un dilemme sont réunis : soit la politique des taux négatifs se diffuse, ce qui pourra difficilement se faire sans impact pour les particuliers, avec un risque potentiel de retour au « bas de laine » (5); soit elle reste partielle et, de facto, ne peut déployer ses pleins effets. A cet égard, l’expérience suisse, où des pratiques de « compensation » sur d’autres segments auraient été observées (hausse des taux sur les emprunts immobiliers), fait apparaître des contradictions qui perturbent la transmission de la politique monétaire.
3. Achats d’obligations d’entreprises : 20 % à taux négatif
Conformément à la décision prise lors de la réunion de politique monétaire de mars (voir flash éco du 10 mars 2016), l’Eurosystème a démarré l’achat d’obligations émises par le secteur privé non financier le 8 juin dernier. Partie intégrante du programme d’achat d’actifs, le « CSPP » (« Corporate sector purchase programme ») prévoit que les principales banques centrales de la zone euro (Allemagne, France, Italie, Espagne, Belgique, Finlande) procèdent à l’acquisition de titres libellés en euro de qualité « investissement ». Parmi les autres critères requis, une maturité restante comprise entre 6 mois et 30 ans au moment de l’achat. En outre, l’émetteur, qui ne peut être une institution de crédit, doit être établi au sein de la zone euro (6). Selon la BCE, l’Eurosystème avait acquis au 15 juillet 10,4Md€ d’obligations corporate dont une très large majorité (93 %) sur le marché secondaire. En termes de montants, les échanges (458 obligations recouvrant 175 émetteurs) ont avant tout concerné les transactions inférieures à 10M€ (58 %), celles comprises entre 10M€ et 50M€ constituant un tiers (34 %) et celles supérieures à 50M€ près de 10 %. La distribution sectorielle des achats fait elle apparaître la prééminence des biens de consommation et des « utilities », tandis que l’industrie n’aurait bénéficié que de moins de 10 % des achats. Enfin, dans le contexte des taux négatifs, il est intéressant de noter que 20 % des achats ont été effectués sur des rendements négatifs, supérieurs au taux de la facilité de dépôt (- 0,4 %).
Phénomène largement théorique il y a encore seulement quelques années, la généralisation des taux négatifs remet en cause l’existence d’un plancher à 0 (« zero lower bound ») pourtant longtemps considéré infranchissable. Quelle est donc la nouvelle borne inférieure ? Y-en-a-t-il d’ailleurs une ? Surtout, quel est l’impact micro et macro-économiques des taux négatifs ? Dans cette nouvelle « Terra incognita » où l’économie « apprend en marchand », de nombreuses questions sont posées, tant sur le plan positif que sur le plan normatif. Clairement porteuse de risques, l’efficacité de cette politique devra être jugée dans le temps en menant parallèlement, à chaque fois que cela est possible, une analyse contrefactuelle (i.e. quelle serait la situation sans cette politique).
(1) Voir l’ouvrage « Politique monétaire », F. Drumetz, C. Pfister et J.-G. Sahuc, De Boeck, 2015.
(2) Garanties apportées à la banque centrale (obligations privées et publiques, obligations bancaires, autres actifs…).
(3) « How have central banks implemented negative policy rates ? », M. Bech & A. Malkhozov, BIS Quarterly Review, March 2016.
(4) Voir cependant la décision récente de la Raiffeisen Bank en Allemagne sur les dépôts > 100k€.
(5) La rémunération des espèces est par définition nulle, d’où une possibilité d’arbitrage (cf. Flash éco du 3 juillet 2015).
(6) Pour plus de détails, voir https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/omt/html/cspp-qa.en.html
FLASH ECO du 8 septembre 2016
« Analyse à caractère économique ne constituant pas une prise de position. Liste complète disponible sur www.afep.com »
(1) Voir l’ouvrage « Politique monétaire », F. Drumetz, C. Pfister et J.-G. Sahuc, De Boeck, 2015.
(2) Garanties apportées à la banque centrale (obligations privées et publiques, obligations bancaires, autres actifs…).
(3) « How have central banks implemented negative policy rates ? », M. Bech & A. Malkhozov, BIS Quarterly Review, March 2016.
(4) Voir cependant la décision récente de la Raiffeisen Bank en Allemagne sur les dépôts > 100k€.
(5) La rémunération des espèces est par définition nulle, d’où une possibilité d’arbitrage (cf. Flash éco du 3 juillet 2015).
(6) Pour plus de détails, voir https://www.ecb.europa.eu/mopo/implement/omt/html/cspp-qa.en.html
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