Dominique Chesneau
Sur la première question, nous tenterons d’éclairer le lecteur en nous livrant à une promenade historique nous conduisant de Kyoto à Copenhague en passant par Bruxelles. Nous rappellerons ensuite les mécanismes du marché du C02 et présenterons brièvement les séries historiques de cours de la tonne de CO2
En 1991, la France avait soutenu, dans le cadre des institutions européennes, l'idée de l'instauration d'une nouvelle taxe mixte sur le carbone et sur l'énergie afin de réduire une partie de l'émission de gaz à effet de serre ; l'écotaxe. Cette technique consistait à taxer l'utilisation des produits générateurs de gaz à effet de serre, de sorte que les utilisateurs soient incités à réduire leur utilisation.
L'écotaxe était à la fois un facteur d'efficacité économique en pesant sur les choix des agents économiques (entreprises, collectivité, ménages) mais aussi le vecteur d'un redéploiement fiscal.
Malgré ces avantages certains, l'écotaxe présente au moins trois inconvénients :
1. Elle agit dans une économie de marché sur les prix et ne permet pas de savoir quelle incidence cela aura sur les quantités, parce que personne ne sait à l'avance quelle sera la réponse effective des utilisateurs ;
2. Une taxe sur les énergies n'a de portée réelle que si elle s'applique à tous - ce qui suppose que les gouvernements aient le courage politique d'affronter de puissantes oppositions, nationales et internationales -, et si elle est conçue, non comme une fin, mais comme un moyen de financer une politique volontariste de réforme ;
3. De plus, de nombreux secteurs industriels, y compris français, grands consommateurs d'énergie étaient très hostiles à ce projet.
Finalement, les pays membres de l'OCDE n'ont pas voulu de cette taxe et le projet de directive européenne fut finalement retiré par la Commission. Le tropisme français pour une éco-taxe ne date donc pas d’hier !
Néanmoins, et pour répondre aux exigences de baisse de production de co2 du protocole de Kyoto, l'Europe a décidé de mettre en place un véritable marché financier dont le titre négocié est le droit de production de co2, ou quota de co2, correspondant à une unité de compte représentative de l'émission de l'équivalent d'une tonne de co2.
La mise en place d'un marché des permis négociables, comme mécanisme de flexibilité a permis, avec des écueils, une plus grande efficacité environnementale. Souvent mal compris cet instrument mérite une analyse plus approfondie pour appréhender les avantages et/ou les inconvénients que l'on peut en attendre.
La directive mentionne le fait que la Communauté s’est engagée à opérer de 2008 à 2012 une réduction de 8% des émissions par rapport à 1990, et qu’à long terme il conviendra de faire passer ce pourcentage de réduction à la valeur minimale de 70 %.
Les réductions des émissions sont opérées en tout lieu de la communauté où leur coût est et sera moins élevé. Ceux qui, dans la Communauté, ne disposent pas de possibilités de réduire leurs émissions à moindres frais tirent avantage des réductions moins coûteuses réalisées ailleurs.
Deux concepts ont inspiré les rédacteurs de la directive. Le premier est celui d’ " autorisation " d’émettre des gaz à effet de serre ( GAS), autorisation dont devront disposer toutes les installations couvertes par le système. Le second est celui de " quota " d’émissions de gaz à effet de serre, calculé en tonnes métriques d’équivalent-dioxyde de carbone, qui donne à son détenteur le droit d’émettre une quantité correspondante de gaz à effet de serre.
L’avantage de cette directive pour l’environnement dépend de la rigueur avec laquelle est établie la quantité totale de quotas octroyés.
Les Etats membres ou leurs autorités compétentes octroient une autorisation d’émettre des gaz à effet de serre prévoyant l’obligation de détenir des quotas équivalents aux émissions effectives, et exigeant une surveillance et une déclaration adéquate des émissions. Les quotas sont transférables tandis que l’autorisation est liée à une installation spécifique. Outre les autorisations, les Etats membres ou leurs autorités compétentes délivrent les quotas. Ceux-ci peuvent être échangés entre les entreprises si elles le désirent. Chaque année, les entreprises doivent faire annuler le nombre de quotas correspondant à leurs émissions effectives. Des sanctions sont prises à leur encontre si elles ne disposent pas de quotas suffisants. Un registre permet de comptabiliser le suivi des quotas. À défaut de pouvoir restituer des quotas correspondant au niveau de leurs émissions vérifiées, les exploitants se voient infliger des amendes substantielles par les Etats membres.
La première phase de mise en œuvre du système, entre 2005 et 2007 a précèdé la période d’engagement dans le cadre du protocole de Kyoto. La commission était convaincue qu’au cours de cette phase préliminaire, la communauté acquérrait une expérience des échanges de droit d’émissions et serait donc prête pour l’ouverture à l’échelle internationale du marché de permis issu du Protocole.
Délivrance des quotas et des sanctions : les Etats membres doivent faire connaître à l’avance à la Commission leurs intentions en ce qui concerne l’octroi des quotas aux installations situées sur leur territoire ; ils sont en outre tenus de suivre un certain nombre de critères communs pour l’octroi des quotas. C’est aussi aux Etats que revient le choix des sanctions.
Couverture sectorielle : lors de la première période (quid des suivantes ?), seules les émissions de dioxyde de carbone provenant des activités énumérées en’annexe 1 de la directive sont couvertes (ne sont pas compris aujourd’hui notamment les secteurs de la chimie et de l’incinération des déchets), ce qui permettra de couvrir approximativement 46% des émissions estimées de CO2 dans l’UE en 2010 (soit 38% du total pour l’UE des gaz couverts par le protocole de kyoto), réparties entre 4000 à 5000 installations. Les Etats membres sont convenus de l’inclusion d’activités supplémentaires à l’Annexe 1 dans le cadre d’une modification de la directive à partir de 2010.
La première phase ayant été achevée le 31 décembre 2007, la deuxième coïncide avec la période d’engagement (2008-2012) du protocole de Kyoto ; Le système fonctionnera ensuite par phases de cinq ans ; Chaque phase permettra aux Etats membres de déterminer les quotas à octroyer aux installations couvertes par la directive.
PNAQ II et chute des prix du CO2 sur les places de marché européennes en avril
Dans son Plan National d’allocation des Quotas (PNAQ), l’Etat définit le montant global de réduction d’émission qu’il doit atteindre puis le répartit entre les secteurs (énergie, industrie, …) et les activités (transformation des métaux, production d’énergie, fabrication de pâte à papier, …) couverts par le Protocole de Kyoto. Les installations concernées se sont donc vues allouées des permis d’émissions couvrant leur « autorisation » à émettre en tonnes équivalent CO2. Au terme de la période, l’installation doit réaliser un inventaire sur le niveau de ses émissions et l’atteinte ou non de son objectif. Elle devra remettre un nombre de permis d’émission correspondant à son objectif. Si les émissions ont été inférieures à son objectif, elle pourra céder ses permis à une installation n’ayant pas réalisé son objectif, en revanche, si elle n’a pas atteint son objectif, elle est tenue d’acquérir des permis supplémentaires et de s’acquitter d’une pénalité.
Pour la période 2005-2007, les installations ont reçues gratuitement des permis d’émissions sur leur compte.
L’enjeu dans la réalisation des PNAQ I était que l’allocation ne soit pas trop restrictive, autrement dit, de veiller à ce que les objectifs sont réalisables et n’entraînent pas de surcoûts trop important mais aussi qu’elle ne soit pas trop laxiste pour être suffisamment incitative.
L’émergence de places de marché européennes (Powernext, EEX, EXAA, …) dédiées aux échanges de permis de CO2 a permis à de nombreux acteurs de se rôder à l’échange de permis et aux installations couvertes par la Directive Quotas d’acquérir ou de vendre des permis en fonction de l’atteinte ou non de leurs objectifs.
Le niveau du prix du permis d’émission sur les places de marché devait également permettre un juste équilibre entre l’offre de permis des acteurs longs (surplus de permis) et des acteurs courts (en manque de permis). Un prix élevé rend incitatif le besoin de mettre en œuvre des solutions au sein des installations pour réduire les émissions de GES et encourage la réalisation de projets MOC et MDP (mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto).
Le 30 juin 2006, les Etats Membres ont été tenus de publier leur PNAQ II pour la période 2008-2012.
Alors que la publication officielle n’est pas encore intervenue et que les Etats Membres sont en train de finaliser leur PNAQ II, certains pays ont délibérément et indépendamment commencé à communiquer sur leur inventaire entraînant une chute brutale des cours des permis d’émission.
En effet, des Etats Membres (France, Suède, Estonie, Pays-Bas, République Tchèque) ont d’ores et déjà annoncé que les installations couvertes par leur PNAQ avaient moins émis en 2005 que l’objectif de réduction qui leur avait été affecté. En d’autres termes, ceci revient à dire qu’elles disposaient de permis supplémentaires qui devaient se retrouver à un moment ou à un autre sur les différentes places de marché. (Selon Point Carbon, le niveau d’émission du secteur énergétique et de l’industrie en France aurait été inférieur de 14,5% à l’objectif fixé par le PNAQ français).
Répondant à la loi de l’offre et de la demande, l’offre de certificat étant largement supérieure à la demande, le prix de marché devait fortement chuter. Ce fut l’option retenue par les opérateurs sur les places de marché puisque la tonne de CO2 est passée en quelques jours de 30€/t à un peu plus de 13€/t. Certains soulevèrent la question de l’incitation à mettre en œuvre des projets, si les prix des permis devaient rester à des niveaux particulièrement bas.
Par ailleurs, le recours à un marché des permis d'émission négociables (PEN) dissocie l'allocation initiale des quotas, déterminée théoriquement selon des critères d'équité, et l'allocation finale. C'est pourquoi, sans autorité de régulation supranationale, les participants au protocole de kyoto qui en ont les moyens peuvent se comporter stratégiquement afin de maximiser leur profit.
Revenons- en aux deux questions initiales
Le programme d’allocation de quotas concerne des secteurs et des activités fortement contributrices d’émission de GAS mais pas la totalité des agents économiques. On a vu la difficulté de détermination de l’empreinte carbone des entreprises concernées et celle du contrôle ex post. On conviendra que la volonté, affichée par l’Europe depuis quelques années, d’étendre l’application de ce concept à toute l’économie serait une tâche impossible. Il faut donc travailler par différence à partir d’une référence absolue de l’année 2009 que l’on connait difficilement ou pas.
Par analogie d’allocation initiale des quotas d’émissions, les autorités françaises ont fait preuve d’esprit pratique : paiement d’une taxe et remboursement de celle-ci. Puis année après année, la valeur unitaire de cette « taxe » devrait augmenter avec la réduction des quotas alloués au pays. Mais le montant total payé par l’émetteur (et non le contribuable !), pourrait baisser si les volumes émis régressent. Par ailleurs, un gouvernement pourra estimer que les efforts réalisés par le pays ont été maximum, malgré un résultat jugé insuffisant, et via l’augmentation du remboursement d’impôt, et augmenter le nombre de permis d’émission.
Les inconvénients d’une écotaxe La fameuse « taxe carbone » n’est donc pas un écotaxe dont les inconvénients ont été évoqués ci-dessus, et la Commission Rocard en était bien consciente. Il s’agit « simplement d’une déclinaison pratique applicable à tous des permis d’émission qui ne doivent pas excéder les quotas. Ceci est cohérent avec le pré-projet de loi dit Grenelle 2 soumis aux négociations des partenaires concernés dans les prochains jours et qui prévoit l’évaluation de leur trace Carbone par les entreprises de plus de 500 personnes. Il reste à espérer que cette cohérence sera conservée après le vote de la loi !
« Permis individuel d’émission » aurait eu une autre allure que « contribution climat-énergie » ou pire « taxe carbone.
Qu’en est-il du prix ? Chacun a senti que les « flottements » de l’exécutif étaient une posture. Afin de ne pas créer de distorsion entre les entreprises ayant accès au marché des permis d’émission et les autres (fortement majoritaires en site), il ‘était impossible de fixer un niveau de prix s’écartant fortement de celui du marché. - On peut à cet égard faire une analogie connue et acceptée avec le niveau des prix administrés de l’électricité et du gaz et la valeur des contrats à terme sur les marchés boursiers de l’énergie-.
Les séries sont les suivantes : ( Voir en annexe pour détail quotidien)
Date et Prix de la tonne de CO2 en euros
01/07/2009 13,06
02/01/2009 15,25
01/07/2008 28,65
19/09/2007 0,07
02/01/2007 5,8
03/07/2006 15,64
19/04/2006 30
02/01/2006 21,75
01/07/2005 26,2
Ces valeurs sont représentatives de la grande volatilité des prix de ces permis d’émission. On note que :
- 14 euros était une valeur proche de celle du marché.
- 5,8 euros anticipaient une allocation de permis fortement excédentaire par rapport à l’anticipation d’utilisation des quotas
- 30 euros anticipaient exactement l’inverse de la situation précédente.
- 0,07 euros correspondaient à la noirceur du moral des économistes alors que la date de réallocation des quotas était lointaine
- 17-20 euros est une moyenne sur « longue période »
Qu’en conclure ?
- Pour éviter une distorsion technique entre agents économiques éligibles au marché et les autres, 14 euros était approprié.
- Si l’on considère que l’urgence d’agir est grande et qu’après un Copenhague « volontariste », les efforts nécessaires de la France seront importants, la valeur de 30 euros est acceptable (cf 32 euros proposé par la Commission ROCARD)
- En considérant que la situation économique va se stabiliser et que les autorités internationales ont acquis une bonne maîtrise de cette mécanique, 17 euros est la bonne valeur !
Fichier Excel (historique du marché du carbone) téléchargeable ci-dessous (3,63 Mo)
Dominique CHESNEAU
Président Tresorisk
31, place Saint Ferdinand
75017 PARIS
L.D. / Fax : + 33 1 40 55 93 98
Mobile : + 33 6 81 70 73 81
dch@tresorisk.com
En 1991, la France avait soutenu, dans le cadre des institutions européennes, l'idée de l'instauration d'une nouvelle taxe mixte sur le carbone et sur l'énergie afin de réduire une partie de l'émission de gaz à effet de serre ; l'écotaxe. Cette technique consistait à taxer l'utilisation des produits générateurs de gaz à effet de serre, de sorte que les utilisateurs soient incités à réduire leur utilisation.
L'écotaxe était à la fois un facteur d'efficacité économique en pesant sur les choix des agents économiques (entreprises, collectivité, ménages) mais aussi le vecteur d'un redéploiement fiscal.
Malgré ces avantages certains, l'écotaxe présente au moins trois inconvénients :
1. Elle agit dans une économie de marché sur les prix et ne permet pas de savoir quelle incidence cela aura sur les quantités, parce que personne ne sait à l'avance quelle sera la réponse effective des utilisateurs ;
2. Une taxe sur les énergies n'a de portée réelle que si elle s'applique à tous - ce qui suppose que les gouvernements aient le courage politique d'affronter de puissantes oppositions, nationales et internationales -, et si elle est conçue, non comme une fin, mais comme un moyen de financer une politique volontariste de réforme ;
3. De plus, de nombreux secteurs industriels, y compris français, grands consommateurs d'énergie étaient très hostiles à ce projet.
Finalement, les pays membres de l'OCDE n'ont pas voulu de cette taxe et le projet de directive européenne fut finalement retiré par la Commission. Le tropisme français pour une éco-taxe ne date donc pas d’hier !
Néanmoins, et pour répondre aux exigences de baisse de production de co2 du protocole de Kyoto, l'Europe a décidé de mettre en place un véritable marché financier dont le titre négocié est le droit de production de co2, ou quota de co2, correspondant à une unité de compte représentative de l'émission de l'équivalent d'une tonne de co2.
La mise en place d'un marché des permis négociables, comme mécanisme de flexibilité a permis, avec des écueils, une plus grande efficacité environnementale. Souvent mal compris cet instrument mérite une analyse plus approfondie pour appréhender les avantages et/ou les inconvénients que l'on peut en attendre.
La directive mentionne le fait que la Communauté s’est engagée à opérer de 2008 à 2012 une réduction de 8% des émissions par rapport à 1990, et qu’à long terme il conviendra de faire passer ce pourcentage de réduction à la valeur minimale de 70 %.
Les réductions des émissions sont opérées en tout lieu de la communauté où leur coût est et sera moins élevé. Ceux qui, dans la Communauté, ne disposent pas de possibilités de réduire leurs émissions à moindres frais tirent avantage des réductions moins coûteuses réalisées ailleurs.
Deux concepts ont inspiré les rédacteurs de la directive. Le premier est celui d’ " autorisation " d’émettre des gaz à effet de serre ( GAS), autorisation dont devront disposer toutes les installations couvertes par le système. Le second est celui de " quota " d’émissions de gaz à effet de serre, calculé en tonnes métriques d’équivalent-dioxyde de carbone, qui donne à son détenteur le droit d’émettre une quantité correspondante de gaz à effet de serre.
L’avantage de cette directive pour l’environnement dépend de la rigueur avec laquelle est établie la quantité totale de quotas octroyés.
Les Etats membres ou leurs autorités compétentes octroient une autorisation d’émettre des gaz à effet de serre prévoyant l’obligation de détenir des quotas équivalents aux émissions effectives, et exigeant une surveillance et une déclaration adéquate des émissions. Les quotas sont transférables tandis que l’autorisation est liée à une installation spécifique. Outre les autorisations, les Etats membres ou leurs autorités compétentes délivrent les quotas. Ceux-ci peuvent être échangés entre les entreprises si elles le désirent. Chaque année, les entreprises doivent faire annuler le nombre de quotas correspondant à leurs émissions effectives. Des sanctions sont prises à leur encontre si elles ne disposent pas de quotas suffisants. Un registre permet de comptabiliser le suivi des quotas. À défaut de pouvoir restituer des quotas correspondant au niveau de leurs émissions vérifiées, les exploitants se voient infliger des amendes substantielles par les Etats membres.
La première phase de mise en œuvre du système, entre 2005 et 2007 a précèdé la période d’engagement dans le cadre du protocole de Kyoto. La commission était convaincue qu’au cours de cette phase préliminaire, la communauté acquérrait une expérience des échanges de droit d’émissions et serait donc prête pour l’ouverture à l’échelle internationale du marché de permis issu du Protocole.
Délivrance des quotas et des sanctions : les Etats membres doivent faire connaître à l’avance à la Commission leurs intentions en ce qui concerne l’octroi des quotas aux installations situées sur leur territoire ; ils sont en outre tenus de suivre un certain nombre de critères communs pour l’octroi des quotas. C’est aussi aux Etats que revient le choix des sanctions.
Couverture sectorielle : lors de la première période (quid des suivantes ?), seules les émissions de dioxyde de carbone provenant des activités énumérées en’annexe 1 de la directive sont couvertes (ne sont pas compris aujourd’hui notamment les secteurs de la chimie et de l’incinération des déchets), ce qui permettra de couvrir approximativement 46% des émissions estimées de CO2 dans l’UE en 2010 (soit 38% du total pour l’UE des gaz couverts par le protocole de kyoto), réparties entre 4000 à 5000 installations. Les Etats membres sont convenus de l’inclusion d’activités supplémentaires à l’Annexe 1 dans le cadre d’une modification de la directive à partir de 2010.
La première phase ayant été achevée le 31 décembre 2007, la deuxième coïncide avec la période d’engagement (2008-2012) du protocole de Kyoto ; Le système fonctionnera ensuite par phases de cinq ans ; Chaque phase permettra aux Etats membres de déterminer les quotas à octroyer aux installations couvertes par la directive.
PNAQ II et chute des prix du CO2 sur les places de marché européennes en avril
Dans son Plan National d’allocation des Quotas (PNAQ), l’Etat définit le montant global de réduction d’émission qu’il doit atteindre puis le répartit entre les secteurs (énergie, industrie, …) et les activités (transformation des métaux, production d’énergie, fabrication de pâte à papier, …) couverts par le Protocole de Kyoto. Les installations concernées se sont donc vues allouées des permis d’émissions couvrant leur « autorisation » à émettre en tonnes équivalent CO2. Au terme de la période, l’installation doit réaliser un inventaire sur le niveau de ses émissions et l’atteinte ou non de son objectif. Elle devra remettre un nombre de permis d’émission correspondant à son objectif. Si les émissions ont été inférieures à son objectif, elle pourra céder ses permis à une installation n’ayant pas réalisé son objectif, en revanche, si elle n’a pas atteint son objectif, elle est tenue d’acquérir des permis supplémentaires et de s’acquitter d’une pénalité.
Pour la période 2005-2007, les installations ont reçues gratuitement des permis d’émissions sur leur compte.
L’enjeu dans la réalisation des PNAQ I était que l’allocation ne soit pas trop restrictive, autrement dit, de veiller à ce que les objectifs sont réalisables et n’entraînent pas de surcoûts trop important mais aussi qu’elle ne soit pas trop laxiste pour être suffisamment incitative.
L’émergence de places de marché européennes (Powernext, EEX, EXAA, …) dédiées aux échanges de permis de CO2 a permis à de nombreux acteurs de se rôder à l’échange de permis et aux installations couvertes par la Directive Quotas d’acquérir ou de vendre des permis en fonction de l’atteinte ou non de leurs objectifs.
Le niveau du prix du permis d’émission sur les places de marché devait également permettre un juste équilibre entre l’offre de permis des acteurs longs (surplus de permis) et des acteurs courts (en manque de permis). Un prix élevé rend incitatif le besoin de mettre en œuvre des solutions au sein des installations pour réduire les émissions de GES et encourage la réalisation de projets MOC et MDP (mécanismes de flexibilité du Protocole de Kyoto).
Le 30 juin 2006, les Etats Membres ont été tenus de publier leur PNAQ II pour la période 2008-2012.
Alors que la publication officielle n’est pas encore intervenue et que les Etats Membres sont en train de finaliser leur PNAQ II, certains pays ont délibérément et indépendamment commencé à communiquer sur leur inventaire entraînant une chute brutale des cours des permis d’émission.
En effet, des Etats Membres (France, Suède, Estonie, Pays-Bas, République Tchèque) ont d’ores et déjà annoncé que les installations couvertes par leur PNAQ avaient moins émis en 2005 que l’objectif de réduction qui leur avait été affecté. En d’autres termes, ceci revient à dire qu’elles disposaient de permis supplémentaires qui devaient se retrouver à un moment ou à un autre sur les différentes places de marché. (Selon Point Carbon, le niveau d’émission du secteur énergétique et de l’industrie en France aurait été inférieur de 14,5% à l’objectif fixé par le PNAQ français).
Répondant à la loi de l’offre et de la demande, l’offre de certificat étant largement supérieure à la demande, le prix de marché devait fortement chuter. Ce fut l’option retenue par les opérateurs sur les places de marché puisque la tonne de CO2 est passée en quelques jours de 30€/t à un peu plus de 13€/t. Certains soulevèrent la question de l’incitation à mettre en œuvre des projets, si les prix des permis devaient rester à des niveaux particulièrement bas.
Par ailleurs, le recours à un marché des permis d'émission négociables (PEN) dissocie l'allocation initiale des quotas, déterminée théoriquement selon des critères d'équité, et l'allocation finale. C'est pourquoi, sans autorité de régulation supranationale, les participants au protocole de kyoto qui en ont les moyens peuvent se comporter stratégiquement afin de maximiser leur profit.
Revenons- en aux deux questions initiales
Le programme d’allocation de quotas concerne des secteurs et des activités fortement contributrices d’émission de GAS mais pas la totalité des agents économiques. On a vu la difficulté de détermination de l’empreinte carbone des entreprises concernées et celle du contrôle ex post. On conviendra que la volonté, affichée par l’Europe depuis quelques années, d’étendre l’application de ce concept à toute l’économie serait une tâche impossible. Il faut donc travailler par différence à partir d’une référence absolue de l’année 2009 que l’on connait difficilement ou pas.
Par analogie d’allocation initiale des quotas d’émissions, les autorités françaises ont fait preuve d’esprit pratique : paiement d’une taxe et remboursement de celle-ci. Puis année après année, la valeur unitaire de cette « taxe » devrait augmenter avec la réduction des quotas alloués au pays. Mais le montant total payé par l’émetteur (et non le contribuable !), pourrait baisser si les volumes émis régressent. Par ailleurs, un gouvernement pourra estimer que les efforts réalisés par le pays ont été maximum, malgré un résultat jugé insuffisant, et via l’augmentation du remboursement d’impôt, et augmenter le nombre de permis d’émission.
Les inconvénients d’une écotaxe La fameuse « taxe carbone » n’est donc pas un écotaxe dont les inconvénients ont été évoqués ci-dessus, et la Commission Rocard en était bien consciente. Il s’agit « simplement d’une déclinaison pratique applicable à tous des permis d’émission qui ne doivent pas excéder les quotas. Ceci est cohérent avec le pré-projet de loi dit Grenelle 2 soumis aux négociations des partenaires concernés dans les prochains jours et qui prévoit l’évaluation de leur trace Carbone par les entreprises de plus de 500 personnes. Il reste à espérer que cette cohérence sera conservée après le vote de la loi !
« Permis individuel d’émission » aurait eu une autre allure que « contribution climat-énergie » ou pire « taxe carbone.
Qu’en est-il du prix ? Chacun a senti que les « flottements » de l’exécutif étaient une posture. Afin de ne pas créer de distorsion entre les entreprises ayant accès au marché des permis d’émission et les autres (fortement majoritaires en site), il ‘était impossible de fixer un niveau de prix s’écartant fortement de celui du marché. - On peut à cet égard faire une analogie connue et acceptée avec le niveau des prix administrés de l’électricité et du gaz et la valeur des contrats à terme sur les marchés boursiers de l’énergie-.
Les séries sont les suivantes : ( Voir en annexe pour détail quotidien)
Date et Prix de la tonne de CO2 en euros
01/07/2009 13,06
02/01/2009 15,25
01/07/2008 28,65
19/09/2007 0,07
02/01/2007 5,8
03/07/2006 15,64
19/04/2006 30
02/01/2006 21,75
01/07/2005 26,2
Ces valeurs sont représentatives de la grande volatilité des prix de ces permis d’émission. On note que :
- 14 euros était une valeur proche de celle du marché.
- 5,8 euros anticipaient une allocation de permis fortement excédentaire par rapport à l’anticipation d’utilisation des quotas
- 30 euros anticipaient exactement l’inverse de la situation précédente.
- 0,07 euros correspondaient à la noirceur du moral des économistes alors que la date de réallocation des quotas était lointaine
- 17-20 euros est une moyenne sur « longue période »
Qu’en conclure ?
- Pour éviter une distorsion technique entre agents économiques éligibles au marché et les autres, 14 euros était approprié.
- Si l’on considère que l’urgence d’agir est grande et qu’après un Copenhague « volontariste », les efforts nécessaires de la France seront importants, la valeur de 30 euros est acceptable (cf 32 euros proposé par la Commission ROCARD)
- En considérant que la situation économique va se stabiliser et que les autorités internationales ont acquis une bonne maîtrise de cette mécanique, 17 euros est la bonne valeur !
Fichier Excel (historique du marché du carbone) téléchargeable ci-dessous (3,63 Mo)
Dominique CHESNEAU
Président Tresorisk
31, place Saint Ferdinand
75017 PARIS
L.D. / Fax : + 33 1 40 55 93 98
Mobile : + 33 6 81 70 73 81
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