L'Actu vue par...Benoît de Jessey : "Le bitcoin serait-il un pari ?"

C’est à priori ce que semblent penser certains députés britanniques composant le Comité du Trésor.
Dans un article récent, ces derniers qualifient les cryptos comme un jeu de hasard et souhaitent adapter la réglementation en conséquence.
Alors les cryptos sont-elles à considérer comme un pari sportif ? Investir dans les cryptos reviendrait-il à miser sur le rouge ou le noir à la roulette ?


Non ! Définitivement un grand non !

Se joindront probablement à mon avis des pays qui en ont fait leur monnaie légale (Salvador), des entreprises on ne peut plus sérieuses qui ont décidé d’investir une partie de leur trésorerie (Tesla), de leurs bénéfices (Tether) ou même d’en faire leur principale stratégie et source de revenus (MicroStrategy).

Je doute également que les banques (Société Générale, Deutsch Bank, Goldman Sachs et bien d’autres) ainsi que les fonds d’investissement réputés (Fidelity, BlackRock…) se soient récemment affiliés à la Française des Jeux !

Et si les propos du Comité peuvent faire écho aux récentes déclarations du patron du Crédit Mutuel, il est grand temps de mettre les points sur les « i » une fois pour toutes.

Certes, certaines cryptos, que l’on appelle dans le milieu des « shitcoins » ne reposent que sur un effet de mode, souvent porté par la communauté (les fameux « mèmes » à l’image du Pepe ou du Dogecoin), mais en faire une généralité serait intellectuellement malhonnête.

La volatilité n’est pas non plus un facteur. Non seulement parce qu’il a déjà été démontré que cette classe d’actif ne l’est pas plus que le S&P500, mais également parce que la volatilité n’a jamais empêché une certaine profitabilité faisant alors le jeu des professionnels de la finance.

Les actions en bourse (Amazon, Netflix, Shopify) seraient-elles un jeu de hasard sous prétexte qu’elles ont perdu près de 80% de leur valeur depuis leur point haut ? Certainement pas.
Les banques traditionnelles (Silvergate, SVB, Signature, Credit Suisse…) ne reposent-elles sur rien sous prétexte qu’elles ont fait faillite ? Certainement pas non plus.
La liste peut continuer indéfiniment…

Finalement, toute la question réside dans le fait de comprendre d’où une crypto tire sa valeur. Les plus avertis connaîtront d’ailleurs le nom que l’on donne à ce type d’analyse : les tokenomics.

Car dire que Bitcoin ne repose sur rien, que l’Ether ou le Ripple ne sont que de vulgaires actifs numériques comparables à du vent, est au mieux de la malhonnêteté, au pire une totale méconnaissance de ce secteur. Or je doute que le Comité du trésor soit dans le deuxième cas…

Prenons comme illustration les deux principales blockchains et leur cryptomonnaie respective : Bitcoin et Ethereum.

Rappel habituel : une blockchain est une technologie de stockage et de transmission de l’information.
Une cryptomonnaie est un actif financier qui transite sur la blockchain.

Il y a donc d’un côté la blockchain Bitcoin, et de l’autre la cryptomonnaie Bitcoin. La première est une infrastructure, une technologie de registre distribuée. La seconde correspond à la crypto native de la Blockchain Bitcoin. Les frais de transactions effectuées sur la blockchain Bitcoin se payent en crypto Bitcoin.

BITCOIN
Bitcoin matérialise la confiance, grâce à son fonctionnement décentralisé et transparent ainsi que sa quantité limitée. A l’inverse d’une planche à billets que l’on peut faire tourner indéfiniment jusqu’à la prochaine crise financière, cette crypto ne pourra jamais être émise à plus de 21 millions d’exemplaires.
Sa valeur réside à la fois dans l’offre et la demande, mais également dans son fonctionnement intrinsèque : son code. Pour créer un Bitcoin, il faut le « miner », c’est à dire allouer de la puissance de calcul de façon à résoudre un algorithme complexe. Tous les quatre ans se produit un phénomène bien connu des cryptophiles : le « halving ». La difficulté de calcul nécessaire au minage est multiplié par deux et la récompense attribuée au mineur divisée par deux. Ainsi, il existe un contrôle de l’inflation au sein même du code du Bitcoin.
Bitcoin permet une transmission de valeur sans passer par un tiers de confiance.
Transparence absolue, quantité limitée, imperméabilité à la censure et décentralisation en font donc toute sa valeur.

ETHEREUM
La blockchain Ethereum a quant à elle permis de révolutionner le domaine des transactions avec la mise en application des smart-contracts, ces programmes autonomes qui s'exécutent automatiquement lorsque certaines conditions prédéfinies sont remplies. Cette fonctionnalité offre une multitude de possibilités, allant des applications décentralisées (dApps) aux protocoles financiers complexes (DeFi) en passant par les jeux en ligne, le marché de l’art numérique et bien d’autres.

Son utilité est telle que l’on retrouve derrière l’Enterprise Ethereum Alliance des sociétés telles que Accenture, Microsoft, JP Morgan, Ernst & Young, BBVA ou encore Santander !

Sa cryptomonnaie native, l'Ether (ETH), joue un rôle essentiel dans l'économie de la blockchain Ethereum. Cette dernière est utilisée afin de payer les frais de transaction du réseau et pour inciter les mineurs à le sécuriser en validant les transactions.

Alors comprenez mon agacement. Dire que tout ça ne repose sur rien est tout à fait grotesque et le comparer à un jeu de hasard encore plus.

Toutefois, rassurons-nous : ce n’est absolument pas l’avis du gouvernement en place, surtout depuis la nomination récente par Charles III d’un Premier Ministre pro-crypto : Rishi Sunak.
Quoi qu’il en soit, si tel était le cas, indépendamment de la signification insultante pour la crypto, les investisseurs pourraient être ravis : au Royaume-Uni, il n’y a pas de taxation sur les plus-values réalisées aux jeux d’argent !

Chronique réalisée par Benoît de Jessey, CEO de Cryptech
Benoit de Jessey est co-fondateur de Cryptech, "solution innovante de placement pour la trésorerie d’entreprise"

Nota Bene
Benoît de Jessey s’exprime ici en qualité de contributeur afin d’éclairer sur des actualités du monde de la crypto. Il ne s’agit en aucun cas de conseil en investissement. Benoît de Jessey et Finyear ont conclu un engagement moral concernant ce point.
Les propos tenus dans cette chronique ne concernent que son auteur. Si Finyear opère un filtre éditorial, les opinions émises ne peuvent pas être considérées comme le reflet de la direction de la rédaction.
Anne-Laure Allain

Lundi 22 Mai 2023


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