Mardi 5 Juin 2007
CFO- News

Interview de Michel Bon senior adviser de la banque Close Brothers


Michel Bon
CFO-news : Monsieur Michel Bon, bonjour. Vous êtes aujourd'hui senior adviser de la banque Close Brothers, du fonds d'investissement Permira et de la firme de conseil stratégique Roland Berger, après avoir été successivement Président de Carrefour et de France Télécom. Pourriez-vous nous apporter votre vision sur le monde de l'entreprise en 2007 ?
Michel Bon : Difficile de répondre en dix lignes à une question si vaste. L'un des problèmes chroniques de la France est qu'elle réchigne à reconnaitre pas que ses entreprises créent l'essentiel de la richesse du pays.D'une certaine façon, nous regardons les entreprises à l'envers : elles sont là pour fournir des emplois si possible permanents, des produits si possible écologiques et des impôts si possible abondants, et on voit cela comme un dû, alors que ce n'est que la conséquence de leur capacité à créer des richesses. Dans la plupart des autres pays développés, on essaie d'orienter les règles de façon à aider les entreprises à être le plus efficace possible; pas chez nous.
De ce point de vue la campagne présidentielle a marqué une vraie rupture, puisque tous les candidats importants ont eu un discours beaucoup plus favorable à l'entreprise que n'était la position traditionnelle de leur parti. C'est un signal très positif. Aux entreprises et à leurs organisations maintenant de consolider cette percée.

De quelles réformes la France a-t-elle besoin pour être plus performante en matière économique et sociale ?
De beaucoup. Depuis 25 ans, nous avons réformé beaucoup moins que nos voisins européens, et nous avons acheté cette inaction relative par le déficit et l'accumulation de dettes. Nous avons donc beaucoupde chantiers devant nous, peut-être même trop pour les conduire aussi bien qu'il le faudrait.
Ceux qui me semblent les plus urgents sont :
- la recherche et l'enseignement supérieur, qui sont la clé de notre compétitivité future;
- l'école où doit s'apprendre le vivre ensemble
- la fiscalité, dont l'essentiel a été conçu il y a plus de cinquante ans et n'a été retouché qu'à la marge depuis 25 ans;
- les dépenses de santé car on ne peut pas continuer à emprunter pour financer les malades d'aujourd'hui
- la réforme de l'Etat, qui doit s'adapter au monde moderne.

Vous êtes toujours en contact permanent avec des entreprises de dimension internationale. Que souhaitez-vous transmettre aux chefs d'entreprises comme conseil ou recommandation face à la mondialisation ?
Que la mondialisation est une chance. Depuis maintenant une dizaine d'année, la croissance mondiale tourne entre 4% et 5%, Elle tire notre économie bien plus surement que ne le font nos voisins immédiats ou notre démographie, et si notre économie ne s'était pas ouverte au monde, elle stagnerait ou régresserait.
Et la France a beaucoup d'atouts à faire valoir. Si l'ont fait le tour de tout ce qui n'est pas délocalisable on voit que bien souvent ce sont des points forts de notre pays : le tourisme ( la France est la première destination touristique au monde), le commerce (la France est à l'origine des rares entreprises mondiales dans ce domaine, à commencer par Carrefour, mais aussi Sonepar ou Rexel), le système de soins, l'administration, etc.

Monsieur Michel Bon, je vous remercie et vous donne rendez-vous dans un prochain numéro.

Michel Bon est né en 1943. Il est marié et père de quatre enfants.
 
Il est diplômé de l'ESSEC, de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, de l'ENA et de la Stanford Business School. À l'ENA il fait partie de la promotion Thomas-More, avec Jean-Louis Bianco, Alain Richard, François d'Aubert et Jean-Claude Trichet.
 
Après quatre ans à l'Inspection des Finances (1971-1975), Michel Bon a passé dix ans dans la banque, d'abord au Crédit National (1975-1978), alors la principale banque de crédit à long terme aux entreprises, puis au Crédit Agricole (1978-1985), première banque de détail française. Il y fut Directeur des engagements, puis Président d'Unicrédit et Directeur Général Adjoint.
 
Au début de 1985, il rejoint Carrefour, la plus grande entreprise de distribution française, dont il sera Directeur Général puis Président jusqu'à fin 1992. Pendant cette période, Carrefour multiplie ses ventes par trois, son résultat par quatre et son cours de bourse par six, ce qui valut à Michel Bon d'être sélectionné pour être manager de l'année en 1991 et 1992 (et à nouveau, mais à France Télécom cette fois, en 1998).
 
En Septembre 1993, il a été nommé par le Gouvernement à la tête de l'Agence Nationale pour l'Emploi. En deux ans, le nombre des personnes qui ont retrouvé du travail grâce à l'action de l'Agence a doublé.
 
Le 13 septembre 1995, il a été nommé Président de France Télécom, poste qu'il occupera jusq'en octobre 2002. Pendant cette période, France Télécom devint une société anonyme et fut introduite en bourse, le statut de son personnel changea, sa productivité doubla, et son monopole disparut avec l'arrivée d'une concurrence généralisée en 1998. Durant ces huit années, le chiffre d'affaire doubla et le résultat opérationnel tripla., et France Télécom devint l'une des principales sociétés mondiales du secteur des télécommunications avec des positions clefs dans le secteur de la téléphonie mobile (Orange), des réseaux de données (Equant) et de l'Internet (Wanadoo). Avec des opérations dans une cinquantaine de pays, France Télécom est présente dans tous les domaines : téléphonie fixe, mobile, données et Internet, services en ligne, services mondiaux, télédiffusion, câble, etc...
 
Aujourd'hui, Michel Bon est président du Conseil de Surveillance de Devoteam, une société de services informatiques cotée sur Euronext, et président du Conseil de Surveillance des Editions du Cerf, la principale maison d'édition religieuse française. Il est également senior adviser de la banque d'affaires Close Brothers, du fonds d'investissement Permira et de la firme de conseil stratégique Roland Berger. Il est administtrateur de plusieurs sociétés parmi lesquelles, en France, Lafarge, Sonepar et Provimi.
Il fut également président de l'ESSEC (1991-2002), de l'Institut Pasteur (2003-2006) et de l'Institut de l'Entreprise ((2002-2004).

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