Mercredi 4 Février 2009

Eric Bourguignon Directeur Général Adjoint de CCR Gestion


Quel regard portez-vous sur les niveaux des spreads atteints sur le marché du crédit ?

Eric Bourguignon
L'indice Merrill Lynch 1-3 ans, représentatif des marges de crédit des entreprises européennes de bonne qualité, affiche des spreads qui ont atteint des niveaux jamais connus jusqu'à alors. Le dernier pic date de la crise de 2002. Déjà à l'époque, l'évolution des spreads nous avait semblé phénoménale et complètement décorrélée des fondamentaux des entreprises. On évoquait le fait que certaines grandes sociétés comme Alstom, Alcatel, France Telecom, Deutsche Telecom, Vivendi étaient sur le point de faire faillite. Les spreads à l'époque étaient à 150.
Actuellement les niveaux de spreads sont trois fois plus élevés que ceux enregistrés en 2002 : un certain nombre de spreads sont au-dessus de 1000, beaucoup de spreads se situent entre 500 et 600, et le minimum atteint est de 300 points de base par rapport à l'Euribor.
De tels niveaux reflètent l’aversion extrême des marchés pour le risque et une augmentation de la prime d’illiquidité sur les obligations privées.

De quelle manière appréhendez-vous l’évolution de la crise de liquidités ?

Suite à la faillite de Lehman, la crise de liquidités a atteint son paroxysme. Nous l'avions-nous-mêmes clairement ressentie dans le cadre de nos activités de société de gestion.
Les autorités monétaires se sont efforcées de reliquéfier l'économie en essayant de débloquer le marché interbancaire en baissant le taux de refinancement, en rentrant dans le capital des banques, en reprenant des créances dans leur bilan (en jouant de ce fait le rôle de banque commerciale classique) et en injectant des fonds dans le système.
Ces différentes actions ont permis une normalisation très progressive de la liquidité du marché. Les taux interbancaires à trois mois ont beaucoup diminué parallèlement à la baisse du taux de l'Eonia. Le marché indique un taux à 3 mois au mois de juin 2009, de 1,97 contre 2,80 aujourd'hui.
Ainsi, l'aversion pour le risque a commencé à diminuer et devrait s'affaiblir tout au long de l'année. En témoignent les chiffres du Vix, indice
de la volatilité, qui commence à se détendre.

Comment envisagez-vous l’évolution du marché du crédit en 2009 ?

En règle générale, lorsque les investisseurs sont rassurés et confiants, ils n’hésitent pas à prendre des risques sur les marchés et les spreads de crédit sont très bas. Aujourd’hui, la situation est inversée : le marché est tétanisé par la peur, peu d’investisseurs sont enclins à prendre des risques et, pour accepter de prêter sur le marché du crédit, ils exigent des niveaux de rémunération particulièrement élevés. Tant que l’inquiétude sur l’avenir restera aussi marquée, les spreads de crédit resteront tendus.
Néanmoins, lorsque l’environnement économique sera un peu plus optimiste, que les plans de relance des gouvernements commenceront à porter leurs fruits, que la conjoncture cessera de se dégrader, nul doute que le marché du crédit saura en profiter. Nous pourrions connaître cette embellie vers la fin du premier semestre 2009.
Dans ce contexte de marché, UBS Global AM et CCR lancent un nouveau fonds géré par CCR Gestion : UBS (F) Crédit Spread 2011.

Pouvez-vous nous présenter ce nouveau fonds en quelques mots ?

L’idée principale de ce fonds vise à profiter d’un niveau de spreads jugé exceptionnel pour obtenir un rendement le plus élevé possible. Il s’agit d’un portefeuille d’obligations de deux et demi à trois ans d’échéance choisies parmi les premiers noms bancaires ou corporates.
Alors que la plupart des obligations qui se traitent sur le marché sont des produits à taux variables, nous avons choisi de créer un produit à taux fixe. La sensibilité aux taux d’intérêt et au risque de crédit s’amoindrit au fur et à mesure de la durée de vie du fonds.
Ainsi, l’objectif est de générer, sur un horizon de placement de 2,5 à 3 ans, un rendement d’environ 5% par an après frais de gestion. Il s’agit d’un rendement très attractif dans un environnement de marché où les taux d’intérêt sont désormais particulièrement bas et le resteront pendant 2 ou 3 ans.
La période de commercialisation court jusqu’à la fin du mois de janvier.

En matière d’allocation sectorielle, plus de 50% du portefeuille est investi sur le secteur bancaire, quelle est la raison de cette exposition marquée sur ce secteur ?

Autant l'actionnaire peut être préoccupé de la rentabilité des institutions bancaires, autant sur l'obligataire, le secteur bancaire apparaît comme particulièrement attractif.
Au cours de cette année, le système bancaire a été au bord du risque systémique avec un risque de défaut en chaîne pour toutes les grandes banques internationales. L’ensemble des mesures prises par les gouvernements et les banques centrales laissent à penser qu’aujourd’hui le système bancaire est « tiré
d’affaire » et que le risque pesant sur le remboursement de la dette de ces émetteurs s’est considérablement réduit.
Le couple rendement/risque du secteur est donc particulièrement attractif : un fort potentiel de rendement, en raison des niveaux des spreads de crédit, associé à un niveau de risque que nous jugeons modéré.

De quelle manière allez-vous vous distinguer en termes de commercialisation par rapport aux autres fonds de crédit qui ont pu être créés ?

En créant le fonds à la mi-décembre, nous avons été l’une des premières sociétés de gestion à lancer ce type de fonds.
Ce qui nous semble important en matière de crédit, c'est de faire les bons choix. Il faut des infrastructures, une équipe d'analystes de qualité, et une expérience significative. CCR Gestion fait du crédit depuis 20 ans. Par ailleurs, UBS Global AM dispose de 27 analystes spécialisés dans le domaine du crédit qui mettent à notre disposition leurs recherches et leurs opinions.

Propos recueillis par UBS Global Asset Management (France) SA, CCR Gestion et CCR Actions

Interview réalisée par easybourse
www.easybourse.com

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