Droit des sociétés : conditions de mise en jeu de l'expertise de minorité

La Cour de cassation précise les conditions pour pouvoir désigner un expert en cas de conventions irrégulières passés entre une société et un de ses associés.


Olivier Vibert
Pourvoi n 08-15313 chambre commerciale 5 mai 2009

A, B, C et D sont 4 associés d'une SARL ECE détenant chacun le quart des parts composant le capital de la société.

A, seul gérant de la société, est condamné pour des faits d'abus de bien sociaux et pour avoir manqué à ses obligations fiscales.

L'administration fiscale prend à ce titre un nantissement sur le fond de la société.

A la suite de ces nantissements, la SARL ECE conclue différents accords avec des sociétés dont les associés étaient actionnaire.

Sont conclus

- Un contrat de mise a disposition de moyens avec une société ECE 2 dont B et C sont associés,
- Un contrat de mise a disposition de clientèle avec une société dont D est associée.
- Un contrat de sous-traitance informatique est passé avec une société civile dont B et C sont associés.

Monsieur A forme une demande auprès du président du Tribunal de commerce afin que soit désigné un expert avec pour mission de se prononcer sur l'existence, le bien fondé et la réalité de ces contrats ainsi que leur intérêt pour la Société.

La Cour d'appel d'Aix en Provence déboute Monsieur A de ses demandes.

Elle relève que :

- A ne s'est pas rendu à l'assemblée générale qui a approuvé ces conventions,
- A n'a pas exercé de recours contre cette décision de l'assemblée générale.
- les conventions ont été approuvées par la collectivité des associés.
- les conventions ne sont pas suspectes car elles sont justifiées par la nécessité de concilier le maintien du gage.

La cour de cassation censure cet arrêt sur plusieurs points.

Elle juge que l'expertise de minorité prévue à l'article 223-37 du code de commerce ne se heurte pas aux conditions relevées par la décision de la Cour d'appel.

Elle relève que l'associé peut demander une expertise même s'il n'a pas voté à l'assemblée générale.

Elle juge encore que l'associe peut parfaitement demander une telle expertise sans qu'il soit nécessaire de contester préalablement l'associe général qui a approuvé les conventions litigieuses.

La cour de cassation juge encore que le fait que la société ait approuvée les conventions litigieuses n'est pas de nature à faire obstacle à l'expertise.

La cour de cassation reproche ensuite a la Cour d'appel de ne pas avoir recherché si la signature des conventions n'avaient pas entraîné une baisse brutale du chiffre d'affaire et si cette baisse n'était pas de nature à faire présumer ces conventions irrégulières.

TEXTES VISES

Article L223-37 du code de commerce

Un ou plusieurs associés représentant au moins le dixième du capital social peuvent, soit individuellement, soit en se groupant sous quelque forme que ce soit, demander en justice la désignation d'un ou plusieurs experts chargés de présenter un rapport sur une ou plusieurs opérations de gestion.

Le ministère public et le comité d'entreprise sont habilités à agir aux mêmes fins.

S'il est fait droit à la demande, la décision de justice détermine l'étendue de la mission et des pouvoirs des experts. Elle peut mettre les honoraires à la charge de la société.

Le rapport est adressé au demandeur, au ministère public, au comité d'entreprise, au commissaire aux comptes ainsi qu'au gérant. Ce rapport doit, en outre, être annexé à celui établi par le commissaire aux comptes en vue de la prochaine assemblée générale et recevoir la même publicité.

Par Olivier VIBERT
Avocat au Barreau de Paris,
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Mercredi 24 Juin 2009


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