Vendredi 12 Février 2016
Finyear, Quotidien Finance d'Entreprise

Directeurs financiers et directeurs achats : une collaboration gagnante pour l’entreprise

Il est encore difficile aujourd’hui pour les Directeurs Administratifs et Financiers de reconnaître et mettre en avant la performance et la valeur ajoutée du département Achats. Pourtant l’optimisation des achats fera partie demain des facteurs clés de succès de l’optimisation des processus financiers.


Franck Le Tendre
À l'heure où les directions financières sont soumises à des contraintes réglementaires toujours plus nombreuses, elles sont à la recherche d'outils et de procédures pour faciliter leur travail au quotidien. La collaboration avec les directions achats et la compréhension de la valeur ajoutée de ces dernières par les DAF, font partie de ces points clés qui demain rendront leur travail plus aisé.

Le lien étroit qui rapproche les CPO (Chief Procurement Officer) et les CFO (Chief Finance Officer) est d'ailleurs beaucoup plus évident qu'il n'y paraît. Dans nombre d'entreprises, le directeur achats dépend hiérarchiquement du DAF, qui n'a pour l'heure qu'une vision très comptable du métier exercé par le département achats.

Valoriser la performance achats aux yeux du DAF

La valorisation de la performance achats est au cœur des préoccupations des CPO, qui ne demandent qu'à être mieux reconnus par les directions financières, souvent peu au fait des actions menées par les équipes achats et se résumant trop souvent à une simple ligne de budget.

Il n'est pas rare que les économies réalisées par les acheteurs grâce à de bonnes relations fournisseurs et un travail quotidien d'optimisation de leurs contrats fournisseurs, soient rapidement effacées et oubliées par les directions financières car ces sommes auront été réaffectées à une autre business unit dans l'entreprise. Par exemple, si un département achat parvient à faire économiser 3 ou 4 millions d'euros sur le budget informatique annuel, mais que la DSI décide d'utiliser cette manne pour d'autres investissements, le DAF n'aura pas -la plupart du temps- de visibilité sur les économies achats réalisées, puisque dans son P&L (Profit and Loss) celles-ci n'apparaissent tout simplement pas.

“Le lien étroit qui rapproche les CPO et les CFO est plus évident qu’il n’y paraît”.

Il y a là un véritable axe de travail collaboratif à mettre en place pour d'un côté, souligner la performance achats et de l'autre, améliorer la compréhension de leur valeur ajoutée dans une fonction qui en a trop souvent une vision uniquement chiffrée.

Un acheteur n’achète pas, il négocie

L'erreur est souvent de mise dans les murs de nos entreprises : le métier d'un acheteur n'est pas d'acheter, mais de négocier, de trouver les meilleurs fournisseurs, d'obtenir les meilleures conditions possibles pour son entreprise. Les approvisionneurs ont besoin d'un accès permanent aux informations de l'entreprise ne serait-ce que pour pouvoir passer une commande. Le processus de passage et de gestion des commandes est en effet généralement intégré au niveau des départements supply chain et finance au sein de l'entreprise. Le département achats a beau mettre en place des contrats cadre, si ceux-ci ne sont pas répercutés au niveau du processus de commande géré par la finance, ils sont tout simplement inutiles.

Imaginons un instant que les achats parviennent à négocier des conditions plus avantageuses (de prix, de délai de livraison ou de paiement...) lors d'un nouveau contrat passé avec l'un de ses fournisseurs. Si l'ERP ou autre système de gestion en place au niveau de la finance (qui passe effectivement la commande) n'a pas intégré ces nouvelles informations (cela peut prendre jusqu'à 8 mois dans certains grands groupes à cause d'un processus défaillant ou l'existence de contrats groupe), alors les prochaines commandes seront toujours passées aux anciennes conditions. Il y a là un manque à gagner évident dû au processus de traitement de l'acte d'achat : un enjeu important pour une meilleure collaboration achats-finance, permettant de gagner en efficacité, en performance et en compliance.

Il existe d'ailleurs un indicateur permettant de mesurer l'étendue de ces dysfonctionnements : le taux de couverture d'achats sous contrat, soit le pourcentage des commandes faisant référence à un contrat à jour. Plus ce pourcentage est élevé, plus la fonction achats se retrouve valorisé au niveau du P&L et du DAF. C'est un indicateur fiable de la qualité de la collaboration, négligée mais pourtant indispensable, entre SI achats et SI finance.

Faciliter la gestion des risques réglementaires et de dépendance financière

Les CFO doivent évoluer en permanence dans une jungle épaisse de réglementations leur rendant la tâche toujours plus compliquée. Parmi les règles moins médiatisées, on en trouve deux qui peuvent avoir des conséquences dramatiques si le lien avec le SI achats n'est pas suffisamment fort.

En effet, la loi impose que les grands groupes réalisent 30% de leurs achats avec des PME françaises, sous peine de se voir infliger des amendes pouvant facilement atteindre plusieurs millions d'euros. Si le sujet est piloté en interne par le département achats, le besoin d'un échange régulier avec la finance est ici évident. Pourtant trop souvent dans les entreprises, aucune alerte au niveau finance n'existe pour signaler que l'on approche de ce seuil et le DAF n'a pas non plus accès aux informations fournisseurs.

La deuxième est la règle de dépendance financière qui stipule que si un fournisseur possède plus de 22% de chiffre d'affaires réalisé auprès d'un seul client, le fournisseur peut légalement demander à son client de le racheter. Un risque majeur dans les grands groupes, si SI Achats et SI Finance ne sont pas assez intégrés pour obtenir une vue globale et centralisée des relations et du statut de la relation avec chaque fournisseur.

Ces trois aspects soulignent le besoin d'un SI Achats qui intègre le fournisseur à 360°, permettant de partager plus facilement et rapidement les informations nécessaires au DAF pour piloter efficacement son P&L. Cela passe par la mise en place d'outils d’analyse des dépenses, des systèmes intégrés de pilotage des contrats et de leurs conditions, du traitement des demandes d'achat et des commandes. Avec un processus de paiement mieux maîtrisé et des fournisseurs pouvant être payés plus vite, l'entreprise peut même espérer profiter d' "early payment discounts" (remises sur le prix pour paiement anticipé). Visibilité et performances améliorées pour les achats, gain en efficacité et en productivité pour la finance, et économies conséquentes pour toute l'entreprise sont à la clé.

A propos de l'auteur :
Franck Le Tendre, Vice Président Exécutif pour l’Europe de l’Ouest et le Directeur Général France de SynerTrade
Evoluant depuis de nombreuses années dans le monde des logiciels mais également des achats, Franck est aujourd’hui responsable des activités au Royaume-Uni, Benelux, en Espagne et Italie de l’éditeur franco-allemand de solutions d’eProcurement SynerTrade. Il assure, via son management d’équipes, l’implémentation de projets SI achats complexes et la mise en œuvre de programmes à forte valeur ajoutée pour l’optimisation des processus achat-finance des entreprises.
Franck détient un MBA de l’INSEEC Bordeaux, avec une spécialisation en Finance, et plus récemment un Master en Management à l’ESCP.

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