Alexandre Callea
Alexandre Callea bonjour, vous êtes co-créateur de Clearmatics, comment l’idée clearmatics est-elle née et s’est-elle matérialisée ?
Au début de l’année dernière je ne connaissais que très peu tout ce qui était bitcoin encore moins blockchain et on pouvait largement me qualifier de crypto-sceptique. A ce moment j’ai été invité à collaborer sur un projet de place de marché monnaies fiat & crypto-monnaies ce qui m’a permis d’entrer dans le monde blockchain et de comprendre la force transformatrice de ces technologies, tant au niveau des usages que des applications. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Robert Sams - qui lui est « tombé dedans lorsqu’il était petit ». Très vite, nous nous sommes rendus compte des avantages que la combinaison « distributed ledger » - « smart-contracts » pouvait apporter dans le monde de la finance institutionnelle et dans les transactions gré-à-gré en particulier. Clearmatics est née peu de temps après.
Tout le monde parle de l’énorme potentiel des monnaies alternatives et des technologies qui les supportent, ce qui est difficilement contestable, mais il faut bien dire que la « planète bitcoin » se positionne généralement en opposition à l’industrie financière : décentralisée, désintermédiarisée et libertaire (pas ou peu réglementée). Clearmatics fournissant essentiellement sa plateforme à une clientèle institutionnelle, comment concilie-t-elle tout ça ?
Il faut à mon sens bien différencier tout ce qui est crypto-monnaie (bitcoin et alternative coins) des nouvelles des nouvelles technologies et applications Fintech qui en ont été inspirées ou qui utilise une partie de la technologie (blockchain). Il est certain que le bitcoin ainsi que la majorité des crypto-monnaies ont été créés avec un esprit révolutionnaire voulant s’affranchir de tout contrôle centralisé (P2P et création de monnaie suivant une règle fixe et publique) et en voulant court-circuiter l’intermédiation financière traditionnelle. Cet esprit reste très présent dans la communauté. Le succès du Bitcoin lié à l’apparition d’autres nouveautés dans les services financiers (P2P Lending, crowdfunding et autres innovations FinTech) ont ouvert la brèche et secoué la planète finance qui maintenant s’engouffre dans le Fintech. De mon point de vue il n’y a pas de réelle opposition. Les crypto-monnaies on certainement un grand avenir (que ce soit une ou plusieurs monnaies existantes ou à créer, généralistes ou spécifiques), mais les monnaies FIAT également. Ces diverses formes de monnaie peuvent – et doivent – coexister en harmonie. Il semble également vraiment prématuré – voire absurde ou infaisable - de pouvoir basculer l’ensemble des transactions financières sur un seul réseau public. En ce qui nous concerne, nous ne percevons pas de contradiction fondamentale et nous nous efforçons de fournir les meilleures solutions de clearing et règlement.
Quelles solutions clearmatics fournit-elle exactement ?
Nous développons ce que nous appelons « next generation clearing machines ». Pour être synthétique, nous proposons une plateforme de clearing et de règlement (clearing & settlement) de transactions financières gré-à-gré (OTC) de nouvelle génération.
La mise en œuvre d’innovations révolutionnaires dans le domaine, les « Distributed Asset Ledgers » (Grand-livres ouverts-partagés) et de « smartcontracts » (contrats intelligents) ouvrent un champ de perspectives totalement nouvelles à l’industrie financière tout en offrant des avantages en terme d’efficacité opérationnelle et de coûts.
Pouvez-vous nous en dire plus ?
A ce jour le clearing et le règlement des transactions financières ne peuvent pas être considérés comme efficients. En effet, si le réseau d’intermédiation actuel peut être considéré comme nécessaire par certains (les avis divergent à ce sujet), les processus opérationnels et technologiques en place sont couteux, sub-optimaux et risqués. Pour un simple paiement en monnaie étrangère, il se peut facilement que 6-8 institutions financières soient impliquées à l’exécution de la transaction, chacune la traitant et l’enregistrant dans un premier temps, la réconciliant avec les autres parties prenantes dans un second temps (Généralement par Swift).
Pourquoi ne pas effectuer cette opération simultanément auprès de toutes les parties ?
Aucune raison, c’est pourquoi notre plateforme distribuée permet à toutes les parties prenantes d’exécuter conjointement et concurremment la transaction et ceci, de manière extrêmement sûre et avec des risques d’erreur moindres.
Par ailleurs, nous pouvons nous étonner de constater qu’il faut toujours plusieurs jours parfois pour délivrer un paiement alors que tout est déjà stocké et traité sous forme digitale. Sur la plateforme clearmatics, l’entièreté du processus est accomplie en quelques secondes tout au plus.
L’efficacité aux niveaux opérationnel et coûts de clearing & règlement est-elle le seul avantage ?
Notre plateforme clearing offre également de nombreux autres avantages additionnels aux livres partagés. Grâce à la technologie des contrats intelligents nous pouvons apporter la notion d’actifs ou d’argent programmable. C’est à mon avis une avancée fondamentale et largement sous-estimée pour l’instant. Avoir la possibilité d’affecter à des actifs financiers des comportements qui se déclenchent automatiquement en fonction de règles ou signaux prédéfinis librement paramétrables permet de libérer l’innovation financière (ce que nous appelons « permission-less innovation ») et de diminuer drastiquement les risques de contrepartie, d’erreur et de fraude.
Par exemple, dans le cas simple d’un escrow nous pouvons programmer la libération des divers actifs. Prenons le cas de l’achat de titres actions dans le cas d’une opération de private equity : un contrat intelligent de vente fixant les termes est créé généré sur la plateforme. A la signature bilatérale qui s’effectue de manière cryptographique le contrat va prendre possession du montant de l’achat (ou à défaut attendre réception des fonds). Ceci effectué, le vendeur est certain que le produit de la vente est disponible et peut transmettre sans risques la propriété de ses titres au contrat. Au moment où le contrat valide le fait que toutes les clauses sont remplies – c’est là qu’intervient l’intelligence – le contrat se dénoue et exécute les transferts de propriété. C’est un cas simple, mais qui illustre bien la puissance des contrats intelligents. Dans ce cas c’est le risque de contrepartie qui est supprimé – et ceci sans intermédiaire ou tiers – pour le vendeur ainsi que pour l’acheteur.
Ces contrats étant in fine décrits sous forme de code, la plateforme clearmatics permet virtuellement d’intégrer n’importe quelle forme de contrat de manière flexible et élégante dans la mesure où aucun changement de logiciel ou nouvelle configuration ne sont requis.
Pour certaines applications les avantages sont énormes. Dans le cas des instruments dérivés OTC, les possibilités d’innovation (création de nouveaux produits à la volée comme par exemple Synthetic Swaps, ISDA replicators, custom index replicators, stats, …), les capacités d’auto-évaluation des contrats, la gestion des marges sécurisée et automatisée ainsi que la diminution des besoins en capitaux par la compression des contrats offrent de nouvelles possibilités extrêmement attractives pour les acteurs du domaine. Toutes les activités de Prime Brokerage bénéficient également immensément des capacités de notre plateforme.
Par ailleurs il convient de noter que de nombreuses caractéristiques rendent notre plateforme regulator & auditor friendly de manière granulaire et paramétrable.
Pensez-vous que votre plateforme ainsi que d’autres nouveaux services Fintech modifieront le système d’intermédiation financier actuel ?
C’est une question très intéressante. Il est assez difficile d’y répondre à ce jour. Conceptuellement et techniquement tous les systèmes de clearing et règlement peuvent être remplacées par quelques plateformes de type clearmatics interconnectées. La désintermédiation est une grande tendance dans le monde bancaire récemment et de nombreux nouveaux acteurs purement FinTech entrent souvent avec succès sur des verticaux généralement opérés par des banques (paiements, transfert internationaux, prêts pair-à-pair, financements, par exemple). Ceci est vrai dans le B2C, mais également dans certains cas dans le B2B. Certains prédisent qu’à terme la fonction des banques se réduira à la seule fonction de dépositaire / « coffre-fort ». Je ne sais pas si ça ira jusque là, mais assurément les facteurs coûts liés à la diminution des marges, innovation dans les services, risque, transparence et réglementaires poussent vers la désintermédiation.
Il faut également considérer l’impact potentiel de l’IoT (internet of things). Les objets connectés auront besoin de portefeuilles embarqués (wallets) pour effectuer des transactions (un frigidaire pour commander du lait ou jus d’orange, un véhicule électrique pour se recharger) et ceci passe nécessairement par une crypto-monnaie qui peut être comparée à des liquidités (cash). Ceci pourrait inverser la tendance de la diminution des espèces en circulation avec l’augmentation de la monnaie dans le système bancaire (paiements par carte et interbancaires) par le retour de paiements comptants (c’est-à-dire en P2P) , mais sous forme électronique. Ces marchés en étant à leurs balbutiements, il est difficile de prédire leur impact.
Alexandre Callea, je vous remercie et vous donne rendez-vous très prochainement dans un nouveau numéro de Finyear.
www.clearmatics.com
Alexandre Callea sera "speaker" lors de notre forum BL0CKCHA1N.
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Au début de l’année dernière je ne connaissais que très peu tout ce qui était bitcoin encore moins blockchain et on pouvait largement me qualifier de crypto-sceptique. A ce moment j’ai été invité à collaborer sur un projet de place de marché monnaies fiat & crypto-monnaies ce qui m’a permis d’entrer dans le monde blockchain et de comprendre la force transformatrice de ces technologies, tant au niveau des usages que des applications. C’est à cette occasion que j’ai rencontré Robert Sams - qui lui est « tombé dedans lorsqu’il était petit ». Très vite, nous nous sommes rendus compte des avantages que la combinaison « distributed ledger » - « smart-contracts » pouvait apporter dans le monde de la finance institutionnelle et dans les transactions gré-à-gré en particulier. Clearmatics est née peu de temps après.
Tout le monde parle de l’énorme potentiel des monnaies alternatives et des technologies qui les supportent, ce qui est difficilement contestable, mais il faut bien dire que la « planète bitcoin » se positionne généralement en opposition à l’industrie financière : décentralisée, désintermédiarisée et libertaire (pas ou peu réglementée). Clearmatics fournissant essentiellement sa plateforme à une clientèle institutionnelle, comment concilie-t-elle tout ça ?
Il faut à mon sens bien différencier tout ce qui est crypto-monnaie (bitcoin et alternative coins) des nouvelles des nouvelles technologies et applications Fintech qui en ont été inspirées ou qui utilise une partie de la technologie (blockchain). Il est certain que le bitcoin ainsi que la majorité des crypto-monnaies ont été créés avec un esprit révolutionnaire voulant s’affranchir de tout contrôle centralisé (P2P et création de monnaie suivant une règle fixe et publique) et en voulant court-circuiter l’intermédiation financière traditionnelle. Cet esprit reste très présent dans la communauté. Le succès du Bitcoin lié à l’apparition d’autres nouveautés dans les services financiers (P2P Lending, crowdfunding et autres innovations FinTech) ont ouvert la brèche et secoué la planète finance qui maintenant s’engouffre dans le Fintech. De mon point de vue il n’y a pas de réelle opposition. Les crypto-monnaies on certainement un grand avenir (que ce soit une ou plusieurs monnaies existantes ou à créer, généralistes ou spécifiques), mais les monnaies FIAT également. Ces diverses formes de monnaie peuvent – et doivent – coexister en harmonie. Il semble également vraiment prématuré – voire absurde ou infaisable - de pouvoir basculer l’ensemble des transactions financières sur un seul réseau public. En ce qui nous concerne, nous ne percevons pas de contradiction fondamentale et nous nous efforçons de fournir les meilleures solutions de clearing et règlement.
Quelles solutions clearmatics fournit-elle exactement ?
Nous développons ce que nous appelons « next generation clearing machines ». Pour être synthétique, nous proposons une plateforme de clearing et de règlement (clearing & settlement) de transactions financières gré-à-gré (OTC) de nouvelle génération.
La mise en œuvre d’innovations révolutionnaires dans le domaine, les « Distributed Asset Ledgers » (Grand-livres ouverts-partagés) et de « smartcontracts » (contrats intelligents) ouvrent un champ de perspectives totalement nouvelles à l’industrie financière tout en offrant des avantages en terme d’efficacité opérationnelle et de coûts.
Pouvez-vous nous en dire plus ?
A ce jour le clearing et le règlement des transactions financières ne peuvent pas être considérés comme efficients. En effet, si le réseau d’intermédiation actuel peut être considéré comme nécessaire par certains (les avis divergent à ce sujet), les processus opérationnels et technologiques en place sont couteux, sub-optimaux et risqués. Pour un simple paiement en monnaie étrangère, il se peut facilement que 6-8 institutions financières soient impliquées à l’exécution de la transaction, chacune la traitant et l’enregistrant dans un premier temps, la réconciliant avec les autres parties prenantes dans un second temps (Généralement par Swift).
Pourquoi ne pas effectuer cette opération simultanément auprès de toutes les parties ?
Aucune raison, c’est pourquoi notre plateforme distribuée permet à toutes les parties prenantes d’exécuter conjointement et concurremment la transaction et ceci, de manière extrêmement sûre et avec des risques d’erreur moindres.
Par ailleurs, nous pouvons nous étonner de constater qu’il faut toujours plusieurs jours parfois pour délivrer un paiement alors que tout est déjà stocké et traité sous forme digitale. Sur la plateforme clearmatics, l’entièreté du processus est accomplie en quelques secondes tout au plus.
L’efficacité aux niveaux opérationnel et coûts de clearing & règlement est-elle le seul avantage ?
Notre plateforme clearing offre également de nombreux autres avantages additionnels aux livres partagés. Grâce à la technologie des contrats intelligents nous pouvons apporter la notion d’actifs ou d’argent programmable. C’est à mon avis une avancée fondamentale et largement sous-estimée pour l’instant. Avoir la possibilité d’affecter à des actifs financiers des comportements qui se déclenchent automatiquement en fonction de règles ou signaux prédéfinis librement paramétrables permet de libérer l’innovation financière (ce que nous appelons « permission-less innovation ») et de diminuer drastiquement les risques de contrepartie, d’erreur et de fraude.
Par exemple, dans le cas simple d’un escrow nous pouvons programmer la libération des divers actifs. Prenons le cas de l’achat de titres actions dans le cas d’une opération de private equity : un contrat intelligent de vente fixant les termes est créé généré sur la plateforme. A la signature bilatérale qui s’effectue de manière cryptographique le contrat va prendre possession du montant de l’achat (ou à défaut attendre réception des fonds). Ceci effectué, le vendeur est certain que le produit de la vente est disponible et peut transmettre sans risques la propriété de ses titres au contrat. Au moment où le contrat valide le fait que toutes les clauses sont remplies – c’est là qu’intervient l’intelligence – le contrat se dénoue et exécute les transferts de propriété. C’est un cas simple, mais qui illustre bien la puissance des contrats intelligents. Dans ce cas c’est le risque de contrepartie qui est supprimé – et ceci sans intermédiaire ou tiers – pour le vendeur ainsi que pour l’acheteur.
Ces contrats étant in fine décrits sous forme de code, la plateforme clearmatics permet virtuellement d’intégrer n’importe quelle forme de contrat de manière flexible et élégante dans la mesure où aucun changement de logiciel ou nouvelle configuration ne sont requis.
Pour certaines applications les avantages sont énormes. Dans le cas des instruments dérivés OTC, les possibilités d’innovation (création de nouveaux produits à la volée comme par exemple Synthetic Swaps, ISDA replicators, custom index replicators, stats, …), les capacités d’auto-évaluation des contrats, la gestion des marges sécurisée et automatisée ainsi que la diminution des besoins en capitaux par la compression des contrats offrent de nouvelles possibilités extrêmement attractives pour les acteurs du domaine. Toutes les activités de Prime Brokerage bénéficient également immensément des capacités de notre plateforme.
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C’est une question très intéressante. Il est assez difficile d’y répondre à ce jour. Conceptuellement et techniquement tous les systèmes de clearing et règlement peuvent être remplacées par quelques plateformes de type clearmatics interconnectées. La désintermédiation est une grande tendance dans le monde bancaire récemment et de nombreux nouveaux acteurs purement FinTech entrent souvent avec succès sur des verticaux généralement opérés par des banques (paiements, transfert internationaux, prêts pair-à-pair, financements, par exemple). Ceci est vrai dans le B2C, mais également dans certains cas dans le B2B. Certains prédisent qu’à terme la fonction des banques se réduira à la seule fonction de dépositaire / « coffre-fort ». Je ne sais pas si ça ira jusque là, mais assurément les facteurs coûts liés à la diminution des marges, innovation dans les services, risque, transparence et réglementaires poussent vers la désintermédiation.
Il faut également considérer l’impact potentiel de l’IoT (internet of things). Les objets connectés auront besoin de portefeuilles embarqués (wallets) pour effectuer des transactions (un frigidaire pour commander du lait ou jus d’orange, un véhicule électrique pour se recharger) et ceci passe nécessairement par une crypto-monnaie qui peut être comparée à des liquidités (cash). Ceci pourrait inverser la tendance de la diminution des espèces en circulation avec l’augmentation de la monnaie dans le système bancaire (paiements par carte et interbancaires) par le retour de paiements comptants (c’est-à-dire en P2P) , mais sous forme électronique. Ces marchés en étant à leurs balbutiements, il est difficile de prédire leur impact.
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