Alain Brégy
Troisième et dernier article consacré aux Blockchains orientées Objets et aux organisations en GOa (Groupes d’Objets associés) appliqués au process O2C (Order to Cash) : de la commande au paiement.
Un GOa (Groupe d’Objets associés) est un modèle organisationnel virtuel non-physique (pas de murs, pas de statuts, pas de noms) et non-pérenne : il ne vit que le temps que dure son projet. Souple, dynamique, horizontal, autonome et décentralisé, il est un outil d’opportunité adapté à des contextes techniques, économiques ou sociaux particuliers. Formé d’un réseau d’individus, d’associations ou d’entreprises, sa raison d’être est d’apporter une structure de réponse adaptée à un problème donné, au contraire des modèles organisationnels « classiques » (institutions, entreprises, associations) trop souvent bridées ou limitées dans leurs possibilités d’action de par leurs statuts ou leurs modes de fonctionnements.
Une usine virtuelle temporaire
Sur une plateforme d’appels d’offres industriels, un client publie une demande de réalisation+livraison de 500 pièces selon cahier des charges fourni. Pour des raisons d’opportunité je souhaite lui faire une offre. Sans posséder en propre ni outil de production, ni murs ni adresse, ni stock de matière première, ni moyens de transport, ni la trésorerie suffisante pour lancer la fabrication, je crée en quelques clics une usine virtuelle temporaire capable de répondre à la demande client.
Je commence par créer un « GOa UsineVirtuelle » que j’ouvre à un « GOa Investisseur », à un « GOa Energéticien », à un producteur de matière première, à un transporteur, à un assureur ainsi qu’à un « GOa Machines », un autre groupe chainé qui possède un certain nombre de machines-outils qu’il loue à l’heure. Un block de la chain contiendra, une fois validé, l’ensemble de ces acteurs considérés en tant qu’objet unique doté de moyens financiers et de la capacité de contractualiser des transactions.
Empiler des couches GOa revient à synthétiser l’ensemble des acteurs en tant qu’objets virtuels dans la blockchain et à permettre à toutes les machines concernées (celles de chaque GOa) d’interagir ensemble selon des jeux de règles écrites dans les contrats liant chaque GOa à un autre. On augmente ainsi la transparence et la traçabilité (chacun sait qui fait quoi), l’horizontalité, la puissance et la rapidité des transactions, tout en garantissant que seuls les objets autorisés ont capacité à réaliser un contrat, bien que tous participent à la transaction.
Contractualisations et transactions d’objets à objets
Arrive ensuite la phase de contractualisation qui va décrire en micro-contrats (smart-contracts) l’intégralité du process O2C : devis, commande, préparation, mise en production, suivi, livraison, facturation, encaissement.
En production « classique » chacune de ces étapes nécessiterait un contrôle par un tiers : est-ce que la commande est conforme au devis ? est-ce que mon outil de production (machine-outil) est optimisé pour la traiter ? est-ce que la matière première a bien été livrée ? est-ce que le nombre de pièces commandées a bien été réalisé ? est-ce que ma facture est conforme à la commande ? est-ce que le client a payé ?
En mode « GOa » contractualisé, une fois tous les micro-contrats écrits, acceptés et validés par tous les protagonistes du process, celui-ci s’initie et ne requerra plus aucune intervention humaine jusqu’à son achèvement. Techniquement parlant, chaque contrat liant objets et/ou groupes d’objets entre eux est écrit dans la chain sous forme de blocs cryptés infalsifiables.
Chaque étape O2C ne pourra être mise en oeuvre que si l’étape précédente est terminée, validée et approuvée par consensus entre les machines. Ce protocole de consensus à la base de blockchain garantit que tous les contrats seront honorés de façon juste et loyale et que chacun remplira sa part du travail et sera rétribué de la façon convenue en toute transparence.
Exemple-type de conditions contractuelles automatisées :
- si le devis est accepté par le client : le Goa Investisseur verse à GOa UsineVirtuelle le montant du coût total de production calculé
- si la prime d’assurance est versée par GOa à assureur : la commande de matière première est passée au producteur
- si le camion du transporteur géolocalisé quitte le point GPS du producteur : le GOa verse directement le coût de la matière sur son compte
- si la matière est livrée à la machine-outil : le transporteur est crédité du montant prévu
- si la machine affiche 500 pièces au compteur : le GOa valide le paiement du temps-machine prévu et des kWh consommés
- si le camion arrive au point GPS du client final et que la livraison est faite : le client verse l’intégralité du montant devisé au GOa
- si le client a payé : le GOa répartit le montant encaissé entre l’investisseur (80%) et mon propre compte (20%). Le GOa est alors immédiatement dissous puisque désormais sans objet.
Chaque étape est une transaction entre objets de la blockchain : quand le GOa paie le temps-machine, c’est un consensus transactionnel entre l’objet/groupe « GOa » et les différents objets constituant l’entité/objet GOa de location de machines ; idem pour l’approvisionnement énergétique.
La gestion des risques
En l’absence de tiers de vérification, des jeux de micro-contrats complémentaires sont écrits au sein du GOa entre les parties et l’assureur : ils précisent en cas de défaillance les conditions contractuelles à appliquer. Par exemple :
- si le camion a un accident, le transporteur en met un autre à disposition dans un délai fixé faute de quoi il est pénalisé
- si la production est plus longue - donc plus énergivore que devisée - le loueur de la machine prend en charge le surcoût énergétique
Dans tous les cas la production, la livraison au client et le paiement des uns et des autres sont couverts et garantis.
Une offre concurrentielle
Je suis donc à moi seul, par la simple création d’un GOa, capable de répondre à une demande industrielle complète et de monter l’organisation opportuniste qui la traitera du début à la fin à un coût de 30% ou 50%, voire 70% inférieur à celui du marché parce que je ne possède pas une seule machine-outil, je ne détiens aucun stock, je n’ai aucun abonnement énergétique, je n’ai pas à maintenir une plateforme de transport et je n’ai ni loyer, ni charges, ni masse salariale.
En terme de productivité, de réactivité et de rentabilité, l’entreprise traditionnelle telle qu’on la connaît est incapable de faire face à des GOa (ou des DAO) opportunistes. Cette dynamique d’écosystème transactionnel temporaire ouvre de larges perspectives sur les possibilités offertes par blockchain. C’est une disruption radicale qui arrivera dans un mois, dans un an ou dans dix ans ; elle posera des questions légales, fiscales, sociales, techniques auxquelles nous ne sommes pas préparés.
Par Alain Brégy
Concepteur BoO (Blockchain orientée Objets)
Co-fondateur & CTO aeDeus Group
hello@aeDeus.com
Article 1 | Blockchain, IA et IoT : Smart-contracts entre Objets
www.finyear.com/Blockchain-IA-et-IoT-Smart-contracts-entre-Objets_a35692.html
Article 2 | Au-delà de Blockchain, les GOa (Groupes d’Objets associés)
www.finyear.com/Au-dela-de-Blockchain-les-GOa-Groupes-d-Objets-associes_a35799.html
Un GOa (Groupe d’Objets associés) est un modèle organisationnel virtuel non-physique (pas de murs, pas de statuts, pas de noms) et non-pérenne : il ne vit que le temps que dure son projet. Souple, dynamique, horizontal, autonome et décentralisé, il est un outil d’opportunité adapté à des contextes techniques, économiques ou sociaux particuliers. Formé d’un réseau d’individus, d’associations ou d’entreprises, sa raison d’être est d’apporter une structure de réponse adaptée à un problème donné, au contraire des modèles organisationnels « classiques » (institutions, entreprises, associations) trop souvent bridées ou limitées dans leurs possibilités d’action de par leurs statuts ou leurs modes de fonctionnements.
Une usine virtuelle temporaire
Sur une plateforme d’appels d’offres industriels, un client publie une demande de réalisation+livraison de 500 pièces selon cahier des charges fourni. Pour des raisons d’opportunité je souhaite lui faire une offre. Sans posséder en propre ni outil de production, ni murs ni adresse, ni stock de matière première, ni moyens de transport, ni la trésorerie suffisante pour lancer la fabrication, je crée en quelques clics une usine virtuelle temporaire capable de répondre à la demande client.
Je commence par créer un « GOa UsineVirtuelle » que j’ouvre à un « GOa Investisseur », à un « GOa Energéticien », à un producteur de matière première, à un transporteur, à un assureur ainsi qu’à un « GOa Machines », un autre groupe chainé qui possède un certain nombre de machines-outils qu’il loue à l’heure. Un block de la chain contiendra, une fois validé, l’ensemble de ces acteurs considérés en tant qu’objet unique doté de moyens financiers et de la capacité de contractualiser des transactions.
Empiler des couches GOa revient à synthétiser l’ensemble des acteurs en tant qu’objets virtuels dans la blockchain et à permettre à toutes les machines concernées (celles de chaque GOa) d’interagir ensemble selon des jeux de règles écrites dans les contrats liant chaque GOa à un autre. On augmente ainsi la transparence et la traçabilité (chacun sait qui fait quoi), l’horizontalité, la puissance et la rapidité des transactions, tout en garantissant que seuls les objets autorisés ont capacité à réaliser un contrat, bien que tous participent à la transaction.
Contractualisations et transactions d’objets à objets
Arrive ensuite la phase de contractualisation qui va décrire en micro-contrats (smart-contracts) l’intégralité du process O2C : devis, commande, préparation, mise en production, suivi, livraison, facturation, encaissement.
En production « classique » chacune de ces étapes nécessiterait un contrôle par un tiers : est-ce que la commande est conforme au devis ? est-ce que mon outil de production (machine-outil) est optimisé pour la traiter ? est-ce que la matière première a bien été livrée ? est-ce que le nombre de pièces commandées a bien été réalisé ? est-ce que ma facture est conforme à la commande ? est-ce que le client a payé ?
En mode « GOa » contractualisé, une fois tous les micro-contrats écrits, acceptés et validés par tous les protagonistes du process, celui-ci s’initie et ne requerra plus aucune intervention humaine jusqu’à son achèvement. Techniquement parlant, chaque contrat liant objets et/ou groupes d’objets entre eux est écrit dans la chain sous forme de blocs cryptés infalsifiables.
Chaque étape O2C ne pourra être mise en oeuvre que si l’étape précédente est terminée, validée et approuvée par consensus entre les machines. Ce protocole de consensus à la base de blockchain garantit que tous les contrats seront honorés de façon juste et loyale et que chacun remplira sa part du travail et sera rétribué de la façon convenue en toute transparence.
Exemple-type de conditions contractuelles automatisées :
- si le devis est accepté par le client : le Goa Investisseur verse à GOa UsineVirtuelle le montant du coût total de production calculé
- si la prime d’assurance est versée par GOa à assureur : la commande de matière première est passée au producteur
- si le camion du transporteur géolocalisé quitte le point GPS du producteur : le GOa verse directement le coût de la matière sur son compte
- si la matière est livrée à la machine-outil : le transporteur est crédité du montant prévu
- si la machine affiche 500 pièces au compteur : le GOa valide le paiement du temps-machine prévu et des kWh consommés
- si le camion arrive au point GPS du client final et que la livraison est faite : le client verse l’intégralité du montant devisé au GOa
- si le client a payé : le GOa répartit le montant encaissé entre l’investisseur (80%) et mon propre compte (20%). Le GOa est alors immédiatement dissous puisque désormais sans objet.
Chaque étape est une transaction entre objets de la blockchain : quand le GOa paie le temps-machine, c’est un consensus transactionnel entre l’objet/groupe « GOa » et les différents objets constituant l’entité/objet GOa de location de machines ; idem pour l’approvisionnement énergétique.
La gestion des risques
En l’absence de tiers de vérification, des jeux de micro-contrats complémentaires sont écrits au sein du GOa entre les parties et l’assureur : ils précisent en cas de défaillance les conditions contractuelles à appliquer. Par exemple :
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Je suis donc à moi seul, par la simple création d’un GOa, capable de répondre à une demande industrielle complète et de monter l’organisation opportuniste qui la traitera du début à la fin à un coût de 30% ou 50%, voire 70% inférieur à celui du marché parce que je ne possède pas une seule machine-outil, je ne détiens aucun stock, je n’ai aucun abonnement énergétique, je n’ai pas à maintenir une plateforme de transport et je n’ai ni loyer, ni charges, ni masse salariale.
En terme de productivité, de réactivité et de rentabilité, l’entreprise traditionnelle telle qu’on la connaît est incapable de faire face à des GOa (ou des DAO) opportunistes. Cette dynamique d’écosystème transactionnel temporaire ouvre de larges perspectives sur les possibilités offertes par blockchain. C’est une disruption radicale qui arrivera dans un mois, dans un an ou dans dix ans ; elle posera des questions légales, fiscales, sociales, techniques auxquelles nous ne sommes pas préparés.
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