Marc Touati
Pire, au regard des préavis de grève et des mouvements annoncés pour les prochains jours, nous ne serions qu'au début de nos peines… Raffineries bloquées, arrêts de travail dans les centrales nucléaires, manifestations un peu partout, et bien sûr grèves chez les contrôleurs aériens, dans les transports en communs et notamment à la SNCF.
Lorsque sait qu'un jour de grève à la SNCF lui coûte environ 50 millions d'euros et génère à lui seul un manque à gagner quotidien de 400 millions pour l'ensemble de l'économie française, on peut imaginer l'ampleur des dégâts de l'ensemble de ces grèves et blocages. D'ici le début juin, le coût global devrait avoisiner les 8 milliards d'euros.
Mais, au-delà de ces coûts directs, qui sont déjà exorbitants, le vrai coût de la grève est ailleurs. D'une part, il réside dans l'affaiblissement global de l'économie nationale. En effet, après un premier trimestre 2016 de rebond technique, les mois d'avril et mai ont été particulièrement mous. Dès lors, la plupart des acteurs économiques français comptaient sur le mois de juin pour « se refaire une santé », avant le long tunnel des vacances d'été. Et ce d'autant que l'Euro 2016 de football était censé nous faire oublier tous nos maux et redonner du baume au cœur aux consommateurs et aux investisseurs… Pour les entreprises, cela devait se traduire par un regain d'activité en correction de la faiblesse passée et en anticipation de la torpeur estivale. Quant aux ménages, et notamment les chômeurs, ils espéraient pouvoir enfin retrouver un emploi et/ou améliorer leurs revenus.
Or, au moment où les entreprises et les particuliers étaient dans les starting-blocks pour essayer de faire un bon mois de juin, ces mouvements de blocage sont venus tout casser. Adieu, veaux, vaches, cochons, reprise, croissance forte et emplois. Pour de nombreuses sociétés et ménages, ce nouveau coup d'arrêt pourrait même être fatal. En effet, dans de nombreux cas, ceux-ci ont réussi à traverser la crise sans trop de dégâts, en puisant dans leurs réserves. Ces dernières étant désormais épuisées, ils risquent de s'effondrer. Autrement dit, il faut se préparer à une forte augmentation des faillites d'entreprises et personnelles au cours des prochains mois et notamment en septembre. Ce que Daech n'a pas réussi à faire, la CGT est peut-être sur le point de le réaliser…
Encore plus pernicieux. Face à ces dangers, certains souhaiteraient que le gouvernement retire la « loi travail », notamment pour passer un « bon » Euro 2016. Une telle décision serait évidemment une grave erreur puisqu'elle entacherait encore la piètre image de la France à l'échelle internationale mais également vis-à-vis des créateurs de richesses français qui pourraient finir par se décourager.
Car, à côté des drames humains que toute cette décroissance va produire, le retour des grèves pour des raisons aussi banales que la réformette de la « loi travail » va encore nuire à la crédibilité de l'économie française en matière de capacité à se réformer. Essayez par exemple d'expliquer aux Allemands, aux Anglais, aux Italiens ou aux Espagnols, voire aux Grecs, qui n'ont cessé de faire des réformes depuis des années presque sans rechigner, que les Français refusent encore de moderniser leur économie. Essayez de leur expliquer comment une petite frange de la population peut paralyser un grand et beau pays comme la France pour le simple motif qu'il ne faut pas toucher à ses petits avantages. C'est perdu d'avance.
Il faut se rendre à l'évidence : nos voisins européens, qui ont tous fait énormément d'efforts et de sacrifices depuis 2008, ne nous comprennent plus et ne sont plus prêts à accepter les dérives françaises. Il est donc grand temps de parler vrai et de responsabiliser nos concitoyens : en temps de crise, et a fortiori en état d'urgence, tout le monde doit se retrousser les manches et personne ne doit l'en empêcher. La liberté s'arrête là où commence celle des autres. Et ce, en particulier dans une économie exsangue, proche de la banqueroute.
Si ce comportement ne change pas, alors il faut se préparer à un nouvel exode de nos jeunes les plus brillants, de nos cerveaux les plus développés et de nos entreprises les plus performantes. En outre, même si aujourd'hui la politique ultra-accommodante de la BCE maintient les investisseurs sous anesthésie dans un « monde parallèle », notamment en stabilisant les taux d'intérêt des obligations d'Etat à des niveaux excessivement bas, ils finiront bien par se réveiller avec la gueule de bois, par exemple lorsque la notation de la dette française sera fortement dégradée.
Cela entraînera tout d'abord une défiance internationale massive. Dans la mesure où plus de 60 % de la dette publique française est détenue par des non-résidents, et malgré l'aide de la BCE, une forte augmentation des taux d'intérêt se produira alors, pesant négativement sur l'investissement, donc sur la croissance et l'emploi. D'où une hausse conséquente du chômage, un accroissement des déficits publics et de la dette, ce qui renforcera la défiance et le cercle pernicieux continuera, entraînant la France dans une crise « à la grecque ».
Pour éviter d'en arriver là, il faut donc absolument arrêter la démagogie et devenir enfin responsable. Il ne s'agit pas simplement d'un problème de bras de fer entre le gouvernement et les syndicats ou encore de l'établissement de prévisions tronquées, mais de l'avenir de nos enfants…
Marc Touati
Economiste.
Président du cabinet ACDEFI (premier cabinet de conseil économique et financier indépendant).
www.acdefi.com;
Lorsque sait qu'un jour de grève à la SNCF lui coûte environ 50 millions d'euros et génère à lui seul un manque à gagner quotidien de 400 millions pour l'ensemble de l'économie française, on peut imaginer l'ampleur des dégâts de l'ensemble de ces grèves et blocages. D'ici le début juin, le coût global devrait avoisiner les 8 milliards d'euros.
Mais, au-delà de ces coûts directs, qui sont déjà exorbitants, le vrai coût de la grève est ailleurs. D'une part, il réside dans l'affaiblissement global de l'économie nationale. En effet, après un premier trimestre 2016 de rebond technique, les mois d'avril et mai ont été particulièrement mous. Dès lors, la plupart des acteurs économiques français comptaient sur le mois de juin pour « se refaire une santé », avant le long tunnel des vacances d'été. Et ce d'autant que l'Euro 2016 de football était censé nous faire oublier tous nos maux et redonner du baume au cœur aux consommateurs et aux investisseurs… Pour les entreprises, cela devait se traduire par un regain d'activité en correction de la faiblesse passée et en anticipation de la torpeur estivale. Quant aux ménages, et notamment les chômeurs, ils espéraient pouvoir enfin retrouver un emploi et/ou améliorer leurs revenus.
Or, au moment où les entreprises et les particuliers étaient dans les starting-blocks pour essayer de faire un bon mois de juin, ces mouvements de blocage sont venus tout casser. Adieu, veaux, vaches, cochons, reprise, croissance forte et emplois. Pour de nombreuses sociétés et ménages, ce nouveau coup d'arrêt pourrait même être fatal. En effet, dans de nombreux cas, ceux-ci ont réussi à traverser la crise sans trop de dégâts, en puisant dans leurs réserves. Ces dernières étant désormais épuisées, ils risquent de s'effondrer. Autrement dit, il faut se préparer à une forte augmentation des faillites d'entreprises et personnelles au cours des prochains mois et notamment en septembre. Ce que Daech n'a pas réussi à faire, la CGT est peut-être sur le point de le réaliser…
Encore plus pernicieux. Face à ces dangers, certains souhaiteraient que le gouvernement retire la « loi travail », notamment pour passer un « bon » Euro 2016. Une telle décision serait évidemment une grave erreur puisqu'elle entacherait encore la piètre image de la France à l'échelle internationale mais également vis-à-vis des créateurs de richesses français qui pourraient finir par se décourager.
Car, à côté des drames humains que toute cette décroissance va produire, le retour des grèves pour des raisons aussi banales que la réformette de la « loi travail » va encore nuire à la crédibilité de l'économie française en matière de capacité à se réformer. Essayez par exemple d'expliquer aux Allemands, aux Anglais, aux Italiens ou aux Espagnols, voire aux Grecs, qui n'ont cessé de faire des réformes depuis des années presque sans rechigner, que les Français refusent encore de moderniser leur économie. Essayez de leur expliquer comment une petite frange de la population peut paralyser un grand et beau pays comme la France pour le simple motif qu'il ne faut pas toucher à ses petits avantages. C'est perdu d'avance.
Il faut se rendre à l'évidence : nos voisins européens, qui ont tous fait énormément d'efforts et de sacrifices depuis 2008, ne nous comprennent plus et ne sont plus prêts à accepter les dérives françaises. Il est donc grand temps de parler vrai et de responsabiliser nos concitoyens : en temps de crise, et a fortiori en état d'urgence, tout le monde doit se retrousser les manches et personne ne doit l'en empêcher. La liberté s'arrête là où commence celle des autres. Et ce, en particulier dans une économie exsangue, proche de la banqueroute.
Si ce comportement ne change pas, alors il faut se préparer à un nouvel exode de nos jeunes les plus brillants, de nos cerveaux les plus développés et de nos entreprises les plus performantes. En outre, même si aujourd'hui la politique ultra-accommodante de la BCE maintient les investisseurs sous anesthésie dans un « monde parallèle », notamment en stabilisant les taux d'intérêt des obligations d'Etat à des niveaux excessivement bas, ils finiront bien par se réveiller avec la gueule de bois, par exemple lorsque la notation de la dette française sera fortement dégradée.
Cela entraînera tout d'abord une défiance internationale massive. Dans la mesure où plus de 60 % de la dette publique française est détenue par des non-résidents, et malgré l'aide de la BCE, une forte augmentation des taux d'intérêt se produira alors, pesant négativement sur l'investissement, donc sur la croissance et l'emploi. D'où une hausse conséquente du chômage, un accroissement des déficits publics et de la dette, ce qui renforcera la défiance et le cercle pernicieux continuera, entraînant la France dans une crise « à la grecque ».
Pour éviter d'en arriver là, il faut donc absolument arrêter la démagogie et devenir enfin responsable. Il ne s'agit pas simplement d'un problème de bras de fer entre le gouvernement et les syndicats ou encore de l'établissement de prévisions tronquées, mais de l'avenir de nos enfants…
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