Mardi 16 Septembre 2008
Laurent Leloup

Après Freddie et Fannie, voici les frères Lehman...

La Bourse vient de connaître un lundi noir. Secoués par l'effondrement de Lehman Brothers, fondée il y a 158 ans, les marchés financiers avaient les yeux rivés sur American International Group (AIG), ce géant du monde de l'assurance, également à risque, dont l'exposition à la crise immobilière américaine est sept fois plus importante.


La chute de Lehman Brothers

Laurent Leloup
Ne parvenant pas à trouver un sauveur sans l'appui des fonds publics ou des garanties de l'État, Lehman Brothers, pilier de Wall Street, a été contrainte de s'en remettre à la protection des tribunaux avec, au passage, plus de 25.000 salariés sur le marché de l'emploi. Jonglant avec un portefeuille immobilier à risque de 60 milliards de dollars, la banque d'affaires entend se restructurer loin des pressions de ses créanciers. Au 31 mai dernier, le géant affichait un passif de 613 milliards reposant sur un actif de 639 milliards, selon les documents déposés.

Enfin Merrill Lynch a dû céder aux avances de Bank of America. Montant de l'acquisition : 50 milliards de dollars (35 milliards d'euros).
Ce rachat est un exemple de la consolidation à marche forcée du secteur financier.

Un climat de méfiance s'installe entre les banques

Alors que jusqu'à présent les autorités étaient intervenues pour éviter des faillites retentissantes (Fannie et Freddie), cette fois point de sauveur au chevet de Lehman Brothers. Ainsi l'espoir des banques de voir intervenir un état bienveillant a été anéanti...
De plus ces mêmes banques doivent désormais vérifier si elles détiennent des créances à l'égard de Lehman Brothers comme elle l'avait fait pour Bear Stearns et ainsi mesurer l'ampleur des dégâts sur leurs équilibres financiers.
Cette mise sous pression a amplifié un climat de méfiance déjà bien installé depuis le début de la crise du subprime.

Afin d'anticiper un scénario catastrophe un groupe de dix banques américaines et étrangères ont joint leurs forces afin de mettre sur pied un plan destiné à protéger le système financier mondial face à l'éventuel effondrement de la banque d'investissement, a indiqué un haut responsable des milieux bancaires.
Ces 10 banques (JPMorgan Chase, Goldman Sachs, Bank of America, Barclays, Citigroup, Crédit Suisse, Deutsche Bank, Merrill Lynch, Morgan Stanley et UBS) ont convenu de mettre en commun jusqu'à 70 milliards de dollars à prêter aux sociétés financières en difficulté, a indiqué ce responsable sous le couvert de l'anonymat.

Par ailleurs la Banque centrale européenne et la Fed ont injecté des liquidités sur le marché. La BCE a placé 30 milliards d'euros dans le secteur financier par le biais d'un appel d'offres exceptionnel. La Fed a alloué 70 milliards de dollars (50 milliards d'euros) aux banques.

Les répercussions devraient être limitées pour les banques françaises.

Christine LAGARDE, ministre de l’Economie, de l’Industrie et de l’Emploi, en liaison avec le Gouverneur de la Banque de France, Christian NOYER, et le Président de l’Autorité des marchés financiers, Michel PRADA, s’est assurée que toutes les mesures étaient prises pour minimiser les répercussions en France de l’annonce, par LEHMAN HOLDING Inc. maison mère du groupe LEHMAN BROTHERS, de son intention de demander aujourd’hui l’ouverture d’une procédure judiciaire aux États-Unis.

La Commission bancaire s’est réunie ce jour lundi 15 septembre et a nommé un administrateur provisoire à la BANQUE LEHMAN BROTHERS, filiale française de LEHMAN BROTHERS INTERNATIONAL et l’entreprise d’investissement succursale en France de LEHMAN BROTHERS INTERNATIONAL (Europe). Les entités françaises LEHMAN BROTHERS n’ont pas d’activité significative de réception de dépôts.
De son coté, l'Autorité des marchés financiers évalue, en collaboration avec LEHMAN BROTHERS ASSET MANAGEMENT FRANCE, l'impact éventuel de la situation de la maison-mère sur l'activité de la société de gestion. De même, il est procédé à l’analyse des conséquences de la situation de LEHMAN BROTHERS sur les actifs gérés par les autres sociétés de gestion de la place. Compte tenu des règles applicables en matière de division des risques ainsi que de conservation des actifs par un établissement séparé, l’impact, en cours d’évaluation, devrait être limité.

Les autorités françaises suivent la situation du groupe LEHMAN BROTHERS en étroite concertation avec les autres autorités concernées, tant au plan international qu’européen, qui agissent en vue de préserver le bon fonctionnement des marchés et des systèmes financiers. Elles restent en relation étroite avec l’ensemble des acteurs du marché qui entretiennent des liens d’affaires avec le groupe LEHMAN BROTHERS.

Les engagements des établissements de crédit français sur le groupe LEHMAN BROTHERS demeurent limités. Les autorités françaises restent très vigilantes quant aux conséquences de la situation de LEHMAN BROTHERS et de l’évolution de la situation générale des marchés financiers sur l’ensemble des institutions financières.

(Communiqué du Ministère de l'Economie)

Après les banques d'affaires, les assureurs ?

L'action de l'assureur American International Group (AIG) a perdu près de 60% de sa valeur, hier à Wall Street soit plus de 90% depuis début 2008.
Après Lehman Brothers, AIG pourrait être la prochaine victime de cette crise financière qui n'en finit pas de secouer la planète financière du fait de sa forte exposition à des produits financiers à risque.

La Tribune écrit ce matin :
"Selon une source proche du dossier, la Réserve fédérale américaine a mandaté la banque d'investissement Morgan Stanley pour étudier les options envisageables pour tenter de stabiliser la situation du groupe. L'Etat de New York a parallèlement accordé au groupe l'autorisation d'emprunter 20 milliards de dollars à ses filiales, via un montage complexe d'échanges d'actifs."

Selon le New York Times :
"l'ex-numéro un mondial de l'assurance a même demandé à la Réserve fédérale (Fed) de lui consentir un prêt relais de 40 milliards..."

En fait c'est sa filiale spécialisée dans les activités de marchés, AIG Financial Products Corp. (AIGFP), apparentée à une banque d'investissement qui a affiche une perte nette de 18 milliards au cours des neuf derniers mois.

Et l'AFP d'ajouter :
"«Je ne peux pas imaginer que la Fed laisse tomber AIG», confiait cependant une analyste d'une grande banque française sous couvert de l'anonymat, hier.
L'assureur compte en effet 74 millions de clients dans le monde, en majeure partie américains, qui se retrouveraient sans assurance en cas de faillite de la société. Il employait 116 000 personnes dans 130 pays fin 2007."

Wait and see.

Laurent Leloup / CFO-news



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